Paille dans la bouche comme les pin-up des magazines, comme à ton habitude, minuit passé, te voilà assise au bar d’un club de nuit. Encore. Encore une nuit dans un bar ou un autre -quelle importance ? toujours les mêmes cocktails pour t’embrumer la tête. Toujours la gamine pilier de bar, qui cherche inconsciemment les regards. T’es désespérante, tu le sais. Et le pire c’est que ce soir n’est pas ton soir, et même si t’attires l’attention, personne n’arrive à illuminer ton regard. Idées noires, tu t’enfiles plus de coktails, et une esquisse de sourire revient bientôt sur tes lèvres. Tu parles avec deux trois mecs, tu fais des beaux sourires, tu minaudes, mais ça ne va toujours pas dans ta tête. T’as besoin d’air ce soir, t’as besoin de ressentir quelque chose, tu sais pas exactement quoi, n’importe quoi. Tu pars remettre du rouge sur tes lèvres, tu souris à la glace, de ton sourire tout fait, qui berne tout le monde, qui pourrait même te berner toi si tu le voulais. Retour au bar, tu t’installes pour commander, les mecs avec qui t’avais discuté se sont volatilisés. Tu hausses les épaules, ils n’étaient pas de premier choix de toute façon, comme à peu près tout ceux qui se trouvent dans cet endroit. Pourquoi t’as choisi de venir là. Et comme pour te répondre, t’entends une voix derrière toi, tu te retournes dans un sursaut, mais tu te rassures quand tu le vois. « Côme. » Tu murmures. Tes yeux retrouvent leur étincelle, et tu rapproches doucement ton corps du sien pour lui déposer un baiser sur sa joue, aussi léger qu’un souffle, avant de te reculer. Tu lui souris avant d’attraper entre tes lèvres la paille de ton cocktail et d’en siroter une petite gorgée avec cet air faussement enfantin qu’il te connait. T’avais enfin trouvé un compagnon de jeu ce soir, et bonus, vous en connaissiez tous les deux les règles. « Un peu moins pourrie maintenant on dirait. » Nonchalamment, tu laisses courir tes doigts sur son avant-bras pendant que tu regardes la salle d’un air distrait autours de toi. Cette soirée était un désastre, et même avec tout l’alcool que t’as dans le sang tu peux encore voir le désespoir qui émane des gens se trouvant là. Sa voix te fait sortir de tes pensées. « Oh, mais c’est que j’ai été très occupée. » Pas vraiment non. Vous savez tous les deux que c’est faux mais il ne relève pas. A chaque rencontre vous jouez tous les deux à dire que c’est un hasard, mais la vérité est que vous êtes tellement paumés à passer vos nuits dehors que vous savez très bien qu’un soir ou l’autre vous allez finir par vous retrouver. Côme, il était beau, et encore plus ce soir, parce que t’étais contente de le revoir. Dans le fond c’était la relation la plus proche de ce que tu pouvais appeler un ami - même si ta définition de l’amitié était bancale, et que comme d’habitude personne ne comprenait. Mais avec Côme c’était facile, déjà parce qu’il était aussi perdu que toi, mais surtout qu’à deux vous arriviez à chasser les nuages le temps d’une nuit, et c’était tout ce qui comptait là ce soir. Tes doigts glissent le long de son bras jusqu’à sa main. « tu veux aller prendre l’air ? »