rp arrangé - Lauri & Benoît

C’est le grand jour, en ce mercredi sortait en salle l’adaptation de mon roman préféré, j’attendais ce moment depuis si longtemps que je comptais presque les jours, ce qui était ridicule pour un homme de mon âge je vous en conviens, mais que voulez-vous ? Ce livre je l’avais lu, relu et encore et encore et lorsque j’avais appris son adaptation cinématographique, je n’avais pas pu être aussi heureux. Bon les films relataient relativement assez mal les émotions du livre, mais le réalisateur qui avait été choisi avait un bon passif… Les acteurs choisis n’étaient pas mon premier choix, mais c’était des acteurs renommés dans le monde hollywoodien alors j’étais sure que ça allait être une bonne adaptation.
Il était dix-neuf heures trente lorsque j’arrivai au cinéma, j’avais pris ma place à l’avance sur internet, j’étais sûre comme ça d’avoir au moins ma place, j’étais un peu stressé, je n’avais pas lu les commentaires et critiques, je n’avais regardé que la première bande-annonce, je voulais un minimum de suspens. J’avais proposé à Amélie de venir avec moi, mais elle n’avait pas autant accroché que moi au style du roman, alors je me retrouvais seul au cinéma, les enfants étaient seuls à la maison, je faisais confiance à mon aîné pour garder son frère. Je venais de passer le contrôle des places, j’achetais une bouteille d’eau et un gobelet de Kit-Kat Ball, oui je ne suis pas un fan de popcorn et alors ? Je trouve que ça colle aux dents, c’est affreux. J’envoyais un dernier message à mon fils avant d’entrer dans la salle, sachant très bien que je n’aurai plus de réseau une fois entré dans la salle.
Ayant enfin trouvé une place assez en hauteur et centré, petite habitude que j’ai pris la première fois que j’ai mis les pieds dans une salle de cinéma, je regardais avec attention les futurs films qui allaient sortir dans peu de temps, puis les pubs défilèrent et je commençais à piocher dans mes kit-kat. Mais voilà, l’heure à enfin sonnée, la salle devient noire, le public se tait, enfin le public nous étions que deux dans la salle et le film commence. Après autant d’attente, j’allais enfin voir le résultat. J’avais tellement d’attente, c’est ridicule d’être dans un tel état pour un film, mais je suis sûre que tout le monde était dans le même état pour les livres qui étaient adaptés en film. C’était vraiment une première pour moi, mais au bout de quelques minutes je commençais à me demander si j’étais dans la bonne salle. Mais c’était une certitude avec les acteurs, mais plus le film avançait plus je me demandais si c’était bien le film qui adaptait le livre que j’aimais tant. Apparemment je n’étais pas le seul à le penser. Mon voisin était dans le même état, et semblait être du même avis lorsque je l’entendis soupirer et dire C’est du n’importe quoi… Je ne pouvais qu’être d’accord. J’avais choisi une version originale parce que j’ai toujours du mal avec le doublage. Mais là, les acteurs jouaient vraiment mal, même une première année à l’école des cours Florent jouait mieux. C’est pathétique ! lâchait-je alors en m’affalant un peu plus dans le fauteuil.

rp arrangé - Benoît & Lauri

Ce livre, Lauri l’avait dévoré en à peine quelques heures, un soir chez lui, alors que sa femme tardait une fois de plus à rentrer du travail. Il l’a tellement aimé, qu’il en parle à tout le monde autour de lui, et le conseil à toute personne susceptible d’apprécier cette œuvre comme lui l’a fait. Il l’a tellement aimé, qu’il l’a même abordé dans son cours à l’université et le recommande à tous ses étudiants. Ce qui semble avoir été une excellente idée, vu les retours et l’enthousiasme de la grande majorité d’entre eux en l’étudiant en classe. Alors forcément, le trentenaire avait été heureux d’apprendre qu’une adaptation cinématographique allée être faite. Évidemment, c’est quelque chose qu’il redoute toujours un peu, généralement les livres restent bien meilleurs que leurs versions cinéma. Il n’y a qu’un seul film à son sens qui a fait vraiment honneur au roman, et pourtant qui en est éloigné par bien des aspects, car ce n’était pas adaptable en l’état, c’est La Ligne Verte. Il y en a d’autres bien évidemment qui ont eu le droit à de très bonnes versions cinématographiques, mais celui-là est clairement une de ces préférées. De ce fait, il appréhende quand même un peu de voir ce que va donner ce livre en film.

Quoi qu’il en soit, c’est le jour J. Enfin, il va pouvoir voir le résultat tant attendu sur grand écran et Lauri en est tout excité comme un gamin la veille de Noël. Lui qui est généralement plutôt calme et posé et complètement euphorique. Malheureusement pour lui, ni Elina, ni Juline ne peuvent l’accompagner. La première refusant la proposition, comme à peu près tout ce qu’il lui propose depuis deux ans. La seconde étant occupée par ses cours et vu qu’elle est en dernière année, elle ne peut pas trop déroger à son programme de révisions pour les partiels de fin d’année. C’est donc en solitaire qu’il va se faire cette séance. Prévoyant, son billet a été acheté en avance sur internet, c’est quand même bien pratique, ça lui permet de venir juste à l’heure pour les bandes-annonces, sans avoir à faire une queue pas possible. Il n’achète rien à grignoter, ça n’a jamais été son truc, lui il mange sainement, alors toutes ces cochonneries il évite le plus possible. Lauri va donc directement à la salle qui lui est indiquée et est surpris de constater qu’ils ne sont que deux dans la salle. C’est pourtant le jour de la sortie, et même si l’horaire qu’il a choisi n’est pas le plus commun, il s’attendait quand même à voir une salle plus remplie que ça. Il s’installe à quelques sièges de l’autre homme. Il n’a que l’embarras du choix, mais se mettre trop loin lui donnerait l’impression de jouer l’antisocial. Lauri s’installe confortablement et attend avec impatience le début du film. Ça y est enfin, c’est parti. Lauri trépigne. Mais dès les premières minutes, l’enthousiasme s’évanouit, laissant place à un air plutôt dubitatif sur le visage. Le choix des acteurs n’était pas parfait selon lui, déjà bien avant la sortie du film, mais elle n’était pas forcément mauvaise non plus. Seulement là, grosse déception. Aucune alchimie entre les protagonistes, leur jeu est insipide et très vite Lauri s’ennuie. Peut-être s’était-il mis la barre trop haut dans ses attentes pour ce film, mais quelle déception. Il aurait presque envie de se lever et de partir, alors que le film est encore loin de la fin. Mais il tient quand même à voir jusqu’au bout ce que ça donne, espérant peut-être une amélioration en cours de route, mais non, rien de ce genre. Ce n’est qu’un film sans saveur et très honnêtement, s’il n’avait pas lu le livre avant, cette adaptation ne lui donnerait absolument pas envie de le lire. « C’est du n’importe quoi ! » Le trentenaire n’est pas forcément du genre expansif, mais là, il est tellement déçu de cette adaptation qu’il ne peut s’empêcher de commenter et laisser parler sa frustration. Apparemment, l’autre spectateur pense comme lui, vu le terme avec lequel il répond. « Non, mais sérieusement, il y avait tellement mieux à faire avec ce bijou qu’est ce roman, mais non, ils ont bousillé l’essence même de l’histoire. » Lauri réplique sans vraiment savoir si le blond s’adressait à lui ou non. Mais il est le seul avec qui il peut partager ses impressions, là dans l’immédiat. « Même le jeu des acteurs est fade, sans aucun intérêt, il n’y a pas une émotion qui transparait. » Frustré comme il est, il pourrait partir en dissertation de quatre heures là, sur le fiasco qu’est cette adaptation.