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La nuit tous les chats sont gris - Timir

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MessageSujet: La nuit tous les chats sont gris - Timir La nuit tous les chats sont gris - Timir Empty31/10/2015, 19:51


   
La nuit tous les chats sont gris.
Tina & Amir
La porte s’ouvrait en grand, et l’air froid de l’extérieur s’engouffrait dans le couloir qui reliait les cuisines à la petite rue de derrière. Amir avait beau connaître la France, s’être habitué à son climat évidement plus froid que celui de Syrie ; il avait beau faire ça tous les jours ; il frissonnait toujours à ce moment-là. Comme c’était lui qui était arrivé le dernier dans l’équipe de ceux payés au noir, il écopait toujours de la corvée de poubelles après le premier service. Une fois les lourds sacs remplis de déchets de cuisine et des restes gaspillés par les clients (ce qui avait toujours impressionné Amir) jetés dans les minuscules bennes à ordures, et posés contre, par manque de place. Amir le désormais commis de cuisine s’adossait toujours contre le mur, un pied à terre l’autre contre la façade. Et il s’en grillait une. Ce n’était pas l’heure de sa pause, mais il se débrouillait pour aller plus vite, et ainsi pouvoir fumer dans un  laps de temps suffisant pour ne pas déclencher les soupçons du chef de partie, un français du Nord qu’Amir avait parfois du mal à comprendre tant son accent était prononcé. Ce qui n’était pas parfois sans occasionner de sérieux malentendus. Malgré tout, le jeune homme avait su se faire une place parmi le personnel de ce petit restaurant très apprécié par les nombreux bobos, cadres aisés et branchés,  et autres hipsters que comptaient la capitale Française. Et son application au travail lui avait valu par deux fois déjà une petite avance sur son salaire. Ce qui était toujours pratique, quand on doit vivre à Paris, encore plus si on y vit clandestinement. La vie étant tellement chère ici.

Amir tirait donc rapidement sur sa cigarette, gardant quelques secondes la fumée dans gorge avant de la souffler dans un petit soupir, il réfléchissait en même temps. Il faisait le point, sur son argent, sur ce qu’il devait faire ensuite, sur celle qui l’attendait surement dans leur petit studio, sur ses problèmes, bref sur comment et quand il allait s’en sortir enfin. Il s'était douté que cela prendrait du temps, pour qu'il puisse reprendre son ancienne vie, avant l'armée, avant la guerre, avant la fuite, avant la pauvreté.  Perdu dans ses pensées, il allait finir de rougir son mégot quand machinalement il tourna le regard vers la droite, à l’angle de la rue il semblait avoir vu un mouvement. Avec l'obscurité qui était tombée il n'avait pas fait attention. Un jour, à se perdre comme ça dans ses pensées, il finirait par se faire prendre, il faudrait qu'il soit plus attentif à l'avenir se dit-il à lui-même alors qu'il scrutait le début de la ruelle à présent. 

   

   
Emi Burton
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MessageSujet: Re: La nuit tous les chats sont gris - Timir La nuit tous les chats sont gris - Timir Empty3/11/2015, 10:54


amir & tina ☆

remember love
remember you and me
remember everything we shared
on this planet when we cared

J'avais mis plus d'une heure à me préparer ce soir-là. Allez savoir pourquoi parce que je n'avais aucun rendez-vous amoureux. A ce moment-là, on aurait pu comprendre que j'avais envie d'être parfaite et d'apparaître sous mon meilleur jour. Mais je n'avais plus à me soucier de ça depuis presque un an maintenant. J'avais rencontré ma perle rare, même si parfois il pouvait me mettre dans des états impossibles. Il faut croire que j'en attendais bien trop de lui. Mais était-ce impensable de demander quelqu'un qui me ressemble dans le fond ? Quelqu'un qui aurait les mêmes attentes et les mêmes envies que moi en somme. J'en venais à penser que je ne serais jamais pleinement satisfaite dans ma vie. Je voulais que mon petit-ami ait autant d'ambition que moi, qu'il vise toujours plus haut. Et je voulais avoir une carrière d'actrice au top et caracoler en tête d'affiches des meilleurs films au cinéma. Pourtant, rien ne se passait comme prévu, triste vie. Et tout ça me minait. Plus que personne ne pourrait jamais l'imaginer. Parce que je n'étais pas dans la norme tout simplement, j'avais besoin de choses que d'autres trouveraient totalement dérisoires. Ce pourquoi j'avais donné rendez-vous à mon agent. Autour d'un dîner entre femmes, nous pourrions parler de mon avenir professionnel, de ce qui s'offrait à moi, de ce que j'avais envie de faire. Cependant, je savais d'avance qu'elle allait en prendre pour son grade. J'avais parfois l'impression qu'elle ne se donnait pas à cent pourcents pour moi et qu'elle était incompétente, clairement. Ou peut-être que c'était moi qui en voulait toujours trop, une fois de plus. Cela dit, je ne l'admettrais jamais, plutôt mourir. J'avais donc patienté dix minutes, vingt minutes, trente, quarante... Près d'une heure plus tard, il n'y avait toujours personne en face de moi. J'avais vraiment l'air ridicule assise seule à ma table, ne commandant rien du tout et renvoyant le serveur à chaque fois qu'il s'approchait. Parfois, je sentais le regard des gens dans ma direction et cela ne faisait que m'horripiler davantage. Oui on m'avait visiblement posé un lapin et je ne l'assumais pas. J'avais envoyé des tas de textos à mon agent, j'avais laissé autant de messages vocaux, pour ne rien recevoir en retour. C'en était bien assez. La seule excuse venant de sa part que je pourrais accepter pour m'avoir humiliée de la sorte était qu'elle ait perdu la vie dans un accident de la route. Il était hors de question que j'ai perdu autant de temps pour rien. J'avais hâte qu'elle me rappelle pour pouvoir l'incendier et ainsi me libérer, mais je n'avais pas hâte pour elle parce qu'elle risquait de s'en souvenir. Elle était payée pour quoi concrètement ? N'y tenant plus, je quittais le restaurant. Prendre l'air du soir me ferait le plus grand bien. Peut-être que ça calmerait mes nerfs par la même occasion. Dehors l'obscurité était déjà là. C'était évident vu le nombre de minutes que j'avais attendu à l'intérieur, je n'avais pas pu voir la nuit tomber. Avançant quelque peu le long de la rue devant le restaurant, je composais une nouvelle fois le même numéro sur mon portable. « Oui c'est moi, encore » commençais-je. Pas besoin de préambule, elle comprendrait bien vite la situation. « Tu m'as clairement plantée, je ne sais pas comment je dois le prendre mais en tout cas, je le prends très mal. J'ai perdu une heure que j'aurais pu employer à quelque chose de bien plus intéressant et maintenant, j'ai faim. Oui parce que je n'allais pas manger toute seule, vu que je pensais naïvement que tu me ferais l'honneur de ta présence. Rappelle-moi, et vite. Bref, à plus » concluais-je, en tapant rageusement sur la case de fin d'appel. Et c'est là que je sursautais. En me tournant machinalement, j'avais repéré une petite étincelle orange sûrement dûe à une cigarette allumée, un peu plus bas dans la rue. On ne voyait absolument rien alors il ne manquerait plus que je me fasse agresser par un voyou traînant dehors à cette heure. De toute façon, je n'avais pas le choix. Pour rentrer chez moi, il fallait que j'empreinte cette ruelle, je n'avais aucune envie de passer la nuit sur le trottoir. Prenant mon courage à deux mains, j'entamais la marche. Et bien évidemment pour que ce soit plus drôle mon talon se prit dans les pavés, me faisant perdre ma chaussure alors que j'étais presque à la hauteur de l'individu. « Et merde ! C'est vraiment pas mon jour » m'emportais-je. Forcée de m'arrêter quelques secondes, je replaçais ma chaussure nerveusement et sentis un regard sur moi. « Quoi ? Vous voulez en profiter pour m'agresser ? Mais allez-y, au point où j'en suis » déclarais-je à l'inconnu qui n'avait rien dit, ni rien demandé. Sauf que je suis comme ça, quand ça va mal, je m'en prends à la terre entière.
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