Cigarette aux coins des lèvres, Raphaël marchait le long des rues parisiennes. Le vent était glacial. Mains dans les poches et tête basse, son regard était planté vers le sol, bien loin de chercher désespérément un visage dans la foule. Ce visage qui pourrait illuminer bien des aspects de sa vie; il l'avait imaginé dans ses rêves et pourtant son image était insaisissable. Un flou planait au-dessus ce qui le rendait inintelligible et obscur. Le reconnaître lui serait pourtant aisé. C'était un simple sentiment, sûrement stupide mais au combien rassurant. No suprises de Radiohead résonnait dans ses oreilles; cette musique vous emportait facilement dans un autre monde. Là où tout ne serait que douceur, calme et volupté. Ainsi Raphaël s'isolait du monde et pouvait échapper aux bribes de conversations. Sa main droite vînt s'emparer de la cigarette- désormais mégot. Ses lèvres bougèrent quelque peu, comme s'il murmurait les paroles. Finalement il releva le regard désireux de trouver un endroit calme et atypique: il fallait donc pour cela qu'il s'engouffre dans les ruelles du 18e arrondissement. Guitare sur le dos il décida donc de s'aventurer dans ces lieux encore inconnus. Se perdre? Impossible. Comme le disait Ed "Tous les chemins mènent à Rome"
Le jeune homme arriva devant un café ou plutôt une librairie café. Ses yeux s'attardèrent sur la petite annonce explicative qu'avait affiché le patron sur la vitrine. Le concept était intéressant- au moins l'endroit devait avoir le mérite d'être calme. Il franchit donc la porte de l'enseigne, retirant ses écouteurs blancs des oreilles. Seul le tintement d'une clochette se fit entendre. Un sourire se dessina sur ses lèvres à l'entente de ce son; cela lui rappelait de vieux shops cosy. D'un pas nonchalant il s'engouffra dans le café. Quelques regards se posèrent sur lui, des curieux certainement. "Bonjour" signifia une voix féminine. Certainement une serveuse. Il hocha simplement la tête et toujours mains dans les poches traversa la salle pour s'asseoir à une table près de la vitrine. Le musicien déposa sa guitare avec soin au sol et commença à se dévêtir. L'endroit était tellement chauffé qu'il en avait des picotements aux mains. Le froid avait engourdi ses doigts, il allait devoir attendre avant de taquiner son instrument. Le jeune homme sortit donc un bouquin de sa house: Les Fleurs du Mal de Baudelaire. Le spleen était certainement un de ses poèmes préférés. L'oeuvre était une vieille édition héritée de la bibliothèque de son grand père. Couverture bleue et reliure dorée, tout cela accompagné du parfum de papier vieilli.
L'anglais en oublia son manque cruel de caféine. Il regarda donc en direction du comptoir, espérant y trouver des employés. Deux apparurent alors dans son champ vision, discutant un instant et lançant des regards curieux en sa direction. Il croisa les pupilles bleues de l'un deux. Celles du jeune homme plus précisément; le sourire de Raphaël fit à nouveau son apparition et il réprima un rire. Commérages. Le musicien ferma bruyamment son ouvrage pour le déposer au coin de la table. Il se leva de sa place et déterminé s'avança vers eux. Le jeune Lefebvre se posta près des individus, avants bras venant se déposer sur la surface plane. Il ne dit rien, regardant attentivement les cafés et spécialités de la maison. Raphaël se mordit la lèvre inférieure et enfin sa voix se fit entendre: " Choix cornélien... "
AVENGEDINCHAINS
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Sujet: Re: Léandre & Raphaël 10/1/2016, 14:11
Jamais Léandre n'aurait eu l'audace d'imaginer, qu'un jour, il prendrait plus de plaisir à aller au travail qu'à rester chez lui. Et pourtant, tel était le cas aujourd'hui et il ne s'en plaignait guère, bien au contraire. Se lever chaque matin, malgré l'heure matinale, était un plaisir pour lui quand la simple idée qu'il allait parler littérature avec des clients parfois passionnés s'épanouissait dans son esprit. Ce matin ne dérogeait pas à la règle. Ce fut un sourire aux lèvres qu'il se prépara chaudement pour affronter le froid de l'hiver et se diriger vers son petit café où il n'était, certes, qu'un employé, mais un employé passionné et travailleur qui faisait la fierté de sa supérieure, petite mamie gâteuse mais toujours pas prête à rendre le tablier.
La boutique était encore fermée quand il y entra par la porte réservée au personnel mais ses collègues, uniquement des femmes, étaient déjà pour la plupart présentes. Ce café mélangeant boissons et livres n'était pas un grande chaîne ni un café dans lequel tout le monde venait s'engouffrer, bien au contraire, ce lieu restait toujours calme et cela plaisait fortement aux employés et à la supérieure qui aimaient ce côté sans bousculades tant qu'ils restaient dans leur chiffre d'affaire. Ainsi, ils n'étaient pas énormément à travailler en ces lieux. Léandre étant le seul homme, la boutique comptait trois autres serveuses se relayant et leur chef, Marie-Jeanne, qui se comportait réellement envers eux comme une grand-mère aimante et aimée. Cette petite vie convenait parfaite à Léandre qui n'aurait réellement pas pu souhaiter mieux, lui qui n'aspirait pas à une vie pleine de paillettes ou d'opportunités incroyables se contentait de la vie qu'il menait.
Ils s'affairèrent tous à ranger et nettoyer le petit café avant que celui-ci ne doivent ouvrir ses portes, à huit heures tapantes. Les tasses se trouvaient correctement rangés, la machine à café prête à être utilisée, des viennoiseries fumantes étaient disposées sur un plateau prévu à cet effet. Les livres étaient disposés dans des bacs sur les tables, une douce musique d'ambiance planait tout autour d'eux sans que cela ne soit dérangeant, les employés avaient tous revêtus leurs tabliers : tout était prêt pour l'ouverture. Et celle-ci arriva bien vite avant que la journée ne commence réellement. Les clients s'enchaînaient, les questions, les services, les pauses, encore les clients, les livres, les questions, les mots échangés, tout ce qui plaisait à Léandre, réellement.
S'occuper des clients lui permettait d'oublier tout ce qui se passait dans sa vie ces derniers temps et la liste n'était pas spécialement longue, seulement décisive : Isaac. Encore aujourd'hui, il ne comprenait pas comment il avait pu laisser les choses aller si facilement alors qu'il connaissait la réputation d'Isaac. Et comparé à lui, on pouvait clairement dire que le jeune tatoueur avait de l'expérience. Mais pourtant, Léandre s'était laissé aller et si parfois il ne le regrettait pas, il lui arrivait, encore aujourd'hui, de se poser des questions. Que voulait Isaac ? Que cherchait-il à avoir, à faire ? Était-ce juste pour le blesser ? Des questions qui demeuraient sans réponse.
Quand le jeune homme entra dans la boutique, Léandre était si occupé à penser à cette histoire qu'il ne fit pas vraiment attention au jeune homme qui venait d'entrer, ni à la guitare qu'il avait apportée. Ce ne fut que quelques minutes plus tard, quand une collègue le coupa de ses pensées pour annoncer l'arrivée d'un nouveau client qu'il le regarda quelques secondes, attendant de savoir qui allait prendre ce client ou non. Mais la réponse ne fut pas donnée puisque ce client se levait de lui-même pour venir commander, juste devant Léandre. Il resta alors à sa place et ne put s'empêcher de sourire en entendant ses mots. « Choix cornélien. » Alors il hocha la tête, car telle était la vérité. Même lui qui travaillait ici depuis pas mal de temps désormais se trouvait parfois perdu devant le montagne de possibilités qu'il avait. « C'est vrai. » lui répondit-il alors en un sourire avant d'ajouter. « Mais prenez votre temps, cela ne presse pas. »
Les employés avouaient eux mêmes la difficulté de faire un choix. Raphaël se pinça les lèvres laissant échapper un "Ok..." peu satisfait. Un soupire se fit entendre de la part du musicien, ses mains tapotaient légèrement le comptoir. Ses yeux bleus passaient des écriteaux au jeune serveur, sourire taquin au coin des lèvres. Ses doigts vinrent s'emmêler dans ses cheveux et finalement, il s'écarta d'un pas. "Surprenez moi dans ce cas" déclara-t-il haussant légèrement les épaules. "Vous avez carte blanche ajouta-t-il d'un léger rire. Raphaël observa les deux employés puis leur tourna les talons.
Le jeune homme avouait sa plate défaite. Habitué depuis trois années au café londonien- en outre immonde, du café soluble n'aurait pas fait la différence- il ne faisait à vrai dire plus la distinction entre un expresso et un café allongé. Cette attitude était en fait représentative de son comportement en général; incapable de prendre des décisions et nonchalant au possible. Ses cheveux en bataille et sa guitare au dos il avait tout l’air du musicien itinérant qui vivait au jour le jour. En outre, il était un stéréotype à lui seul.
Le guitariste prit donc à nouveau place dans son fauteuil et il se saisit de son ouvrage. Le jeune Lefebvre tomba alors sur Parfum exotique … Un des poèmes les plus intéressants de Baudelaire parmi La Charogne ou encore Le Spleen. Un de ceux qui n'était pas emprunt de sa nature dépressive et de sa banale amertume. Ses yeux bleus parcouraient lentement les lignes. Il s'arrêta alors un moment et lança un regard furtif au jeune serveur-légèrement pessimiste quant à sa commande. Raphaël observait alors l'employé avec attention qui dos à lui, préparait sa boisson. Son regard dériva ‘malencontreusement’ vers son fessier. Dieu avait pourvu les hommes de la vue, ce sens devait bien servir à quelque chose. Quand ce dernier se tourna, son visage ingénu apparu dans le champ de vision du londonien. Trop candide, pensa-t-il. Il lâcha un énième soupire. Délaissant cette douce contemplation le jeune homme attrapa ses écouteurs; la musique parvenait si bien à le couper du monde que cela en devenait addictif. En tant que puriste, David Bowie était de la mise. Il prit tout de même le soin de baisser le volume afin de ne pas déranger les autres clients- peu nombreux encore à cette heure ci. Raphaël replongea dans sa lecture, cette fois-ci plus déterminé que précédemment. La distraction était ‘aisée’, si l’on puit dire. Une gueule d’ange, réellement. Ses lèvres fines se mouvaient, se positionnant sur les paroles de la chanson, sa voix ne se faisait pourtant pas entendre. ‘Rebel Rebel’ était néanmoins facilement décelable. Ainsi il se laissait choir sur sa chaise laissant de côté tout maintien et tenue convenable. Qu’il était agréable de se laisser vivre. Paris avait toujours été pour lui la capitale de la déchéance; plus sérieusement, chaque rue était emprunt de son adolescence, des quatre cents coups qu’il avait pu faire avec son meilleur ami Noah. Cette époque lui manquait, horriblement. Les responsabilités d’adultes semblaient lointaines et une sorte d’insouciance régnait encore. Oui, ‘sorte’ car lorsque l’on se dénomme Raphaël Lefebvre, le diable a prit littéralement possession de vous. Changes, de Bowie résonnait alors dans ses oreilles. Le jeune homme sourit de toutes ses dents. Le hasard avait un tel sens de l’ironie que cela en devenait risible, Egdar est-ce toi qui m’envoie un message de l’au-delà pensa-t-il alors. Encore une fois, il ne pu résister de murmurer les paroles à voix basse.
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