Il était tard. La nuit était déjà bien tombée, et Alice venait de rentrer d'une longue journée de cours. Elle adorait étudier, elle avait soif de connaissance, et passait énormément de temps non seulement à réviser ses cours, mais aussi à fouiller la bibliothèque universitaire à la recherche de quelconque ouvrage qui lui apporterait encore plus de connaissance. Elle avait choisi d'étudier les langues, mais elle n'avait aucune idée de ce qu'elle souhaitait faire de sa vie, si ce n'est apprendre. Elle voudrait être trop de choses en même temps. Astronaute, professeur, médecin, mathématicienne. Ou libraire, comme son père. Elle ne savait pas, et c'était bien le seul domaine dans sa vie pour lequel la jeune fille avait des doutes. Autrement, elle savait toujours ce qu'elle voulait, et ce qu'elle faisait. Elle déposa ses clés sur le meuble de l'entrée, et accrocha sa veste au porte-manteau. Elle ne prit pas la peine de poser ses chaussures. Anaïs n'était pas là pour la soirée, et Alice n'avait pas envie de rester seule à l'appartement. Elle aurait pu appeler Félix, ou Flavie, ou n'importe lequel de ses amis, mais ce soir, elle savait qui elle voulait voir. En rentrant, elle s'était arrêtée au restaurant asiatique en bas de la rue, et avait commandé des sushis végétariens à emporter. Elle se contenta de refermer la porte derrière elle, et de traverser le petit palier qui séparait son appartement de celui de son voisin, Antoine. Elle frappa trois coups à la porte, comme à son habitude. Elle ne l'avait pas vu depuis quelques jours déjà. Elle avait été très prise par ses études, et avait passé beaucoup de temps avec ses amis. Et le jeune homme n'avait pas semblé daigner sortir de chez lui. Ça arrivait souvent, cela dit. Parfois, elle l'entendait quitter son antre, mais elle avait à peine le temps de courir jusqu'à la porte pour le voir, qu'il avait déjà disparu dans l'escalier. Elle avait pris l'habitude de passer chez lui, à l'improviste. Parce qu'elle aimait les surprises, et qu'elle aimait sa compagnie, malgré tout. Et ce soir, elle avait décidé qu'elle s'incrusterait encore chez lui, même s'il ne voulait voir personne. Elle attendit patiemment que la porte s'ouvre, et leva le sac près de son visage, un sourire malicieux aux lèvres, en voyant le jeune homme, cigarette à la bouche. Elle ne prit pas la peine d'attendre qu'il l'invite, et se faufila sous le bras d'Antoine pour entrer dans son appartement. Il faisait sombre, et la pièce principale était dans un bazar sans nom. - Tu sais que ça te tuera un jour, dit-elle en montrant la cigarette d'un signe de tête. Elle n'aimait pas les cigarettes. Son père était décédé d'un cancer des poumons, il avait vécu un calvaire pendant des années, et ce sans n'avoir jamais touché au tabac. Elle ne comprenait pas comment on pouvait fumer en sachant ce que ça impliquait. Elle tenait à ses poumons, et tout le monde devrait tenir aux leurs. - Sushis végétariens, j'espère que t'as pas encore mangé, annonça-t-elle en posant le sac en papier du restaurant japonais sur le canapé. Meeko débarqua dans la pièce, à l'évidence heureux de voir la jeune femme. Elle s'agenouilla pour le caresser vivement. Alice avait toujours adoré les chiens, mais n'avait jamais pu en avoir un à elle. Alors elle se contentait d'aimer ceux des autres. Et souvent, ils le lui rendaient bien.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 13:20
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Il est trois heures. Je n’ai pas encore réussi à m’endormir. J’ai peur de dormir. Je sais que chaque fois que je m’endors, je me réveille en sursaut, si ce n’est en criant. Ces maudits cauchemars me hantent. Je vais devenir fou. Je sors de mon lit. J’étais pourtant bien sous ma grosse couverture. Je vais dans ce qui me sert de salon. Enfin pour l’heure, c’est surtout un cimetière de bouteilles. Vodka, Whisky, Bière, et même quelques bouteilles de Gin. Je bois, je fume. Des cendriers sont posés à peu près partout, et ils sont pleins. Si mes souvenirs sont bons, je n’ai ni rangé, ni nettoyé depuis au moins une semaine. Je le ferais plus tard. Un jour, il faudra que j’arrête avec cette excuse vraiment stupide. Je m’assois sur le canapé, entre plusieurs bouteilles. Je regarde Meeko, qui me regarde avec des yeux à moitié ouverts. Il se lève et vient vers moi. Je souris. Comme quoi, le chien est le meilleur ami de l’homme. Je pousse les bouteilles et lui fait signe de monter. Il se couche, pose sa tête sur mes genoux. Qu’est-ce que je ferais sans lui ? Je serais plus seul que maintenant. Il se rendort rapidement. Ah, si seulement j’arrivais à m’endormir aussi vite. Ce n’est pas dans mes plans. Je sais très bien que je ne vais pas dormir de la nuit. J’allume la télé. Forcément, il n’y a aucun programme intéressant à cette heure-ci. J’éteins presque immédiatement, et j’attrape un livre, posé non loin.
Il est huit heures. Je n’ai pas dormi. Je dois aller travailler. Meeko est déjà réveillé, prêt à affronter cette journée. Il ferait mieux d’aller au garage à ma place, il serait plus efficace. Je prends une douche, enfile un jean et un pull. Je n’ose même pas passer devant le miroir tellement je dois avoir un air de zombie. J’attrape une pomme, que je croque tranquillement. Je ne suis pas pressé. Pourtant, je n’aime pas être en retard. Mais quand bien même je le serais, il y a plus grave, non ? Je regarde mon chien, assit devant la porte. « Tu veux venir ? » Quelle question… Il aboi, pour gentiment me répondre. J’attrape la laisse, et l’emmène avec moi. L’avantage de mon boulot, c’est qu’ils acceptent mon chien, ça lui permet de ne pas rester seul toute la journée.
Il est vingt-heures. Je rentre juste chez moi. J’ai profité de la motivation de mon chien pour faire un petit tour après le boulot. Je lance mes clés sur la table. Elles tombent. Tant pis, je les ramasserais plus tard. J’enlève ma veste, et la pose sur le canapé. Je me pose sur une chaise, et continue la lecture d’un des livres que j’ai commencé cette nuit. Par la même occasion, j’allume une clope, et prends une bière. C’est le début de soirée, je vais commencer doucement. Enfin je dis ça, mais dans cinq minutes je tourne au whisky. J’entends trois coups frapper à ma porte. Aucun doute, c’est Alice. D’un pas nonchalant, je vais ouvrir. Elle est là, avec son sourire et son sac de sushi –végétarien en plus. Sa petite réflexion sur la cigarette me fait répondre d’un léger sourire, par pure politesse. Elle entre, sans que j’ai vraiment le temps de réagir. J’aime bien sa présence. « Je n’ai pas faim, mais merci. » Je retourne m’asseoir et prends plusieurs gorgées de ma bière. Meeko s’occupe d’accueillir cette belle demoiselle à ma place. C’est un travail d’équipe.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 14:29
Alice essayait toujours de ne pas faire attention aux bouteilles vides qui jonchaient le sol de l'appartement d'Antoine. Mais c'était difficile, parce qu'elle savait ce qu'elles représentaient. Machinalement, elle en attrapa quelques unes, qu'elle posa dans un coin de la pièce. Le jeune homme empestait le tabac, et avait les traits tirés par la fatigue. Mais Alice ne le remarquait plus. Parce que c'était toujours le cas. Elle ne savait pas grand chose de lui, parce qu'il n'était jamais très bavard et que la plupart du temps, c'était elle qui faisait la conversation. Mais elle n'était pas aveugle, ni stupide, et du peu qu'elle savait, elle avait compris bien des choses. Il n'avait pas faim. En fait, il n'avait jamais faim. Il aurait pu lui dire de partir, elle l'aurait sûrement fait. Mais il ne l'avait jamais demandé. Comme s'il se fichait de sa présence, comme il se fichait de tout. - Tant pis, ça en fera plus pour moi! Elle alluma une autre lampe, parce qu'il faisait vraiment sombre et Alice aimait la lumière. Et si ça présence n'éclairait pas la vie d'Antoine, alors elle pouvait au moins l'éviter de sombrer dans le noir, au sens propre du terme. Elle s'assit sur la table basse, face au jeune homme, et l'observa, sourire aux lèvres. Elle prit la bouteille de bière qu'il tenait, en bu une gorgée et la lui rendit. - En tout cas, moi je meurs de faim. Elle tendit le bras pour attraper le sac de sushis, et s'assit par terre de l'autre côté de la table basse. Meeko vint s'assoir à côté d'elle, sa tête dépassant celle d'Alice de quelques centimètres. Elle avait la manie de se sentir comme chez elle à peu près partout. Et c'était encore plus le cas ici. Et s'il y avait bien une chose dont elle se fichait, c'était ce qu'en pensait les autres. Elle gardait le sourire aux lèvres, toujours, et était convaincue qu'un jour, elle arrivait à tirer à Antoine un véritable sourire - pas un de simple politesse, ou même un rire. Elle enfila un sushis dans sa bouche, caressant d'une main la grosse tête du chien. - Allez, Tony. Je suis sûr que tu meuuuurs de faim. Regarde ces sushis alléchants, et dis moi que t'as pas envie d'en manger un. En me regardant dans les yeux, bien sûr. Elle agita un sushi serré entre deux baguettes, qui attirait visiblement l'attention de Meeko. - Décide toi tout de suite, ou c'est lui qui risque d'en profiter, chuchota-t-elle en désignant le chien d'un coup d'oeil.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 16:33
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Elle s’assoit, face à moi. Heureusement pour elle, mon adorable chien montre que sa présence ne nous dérange pas tant que ça. Je suis incapable de lui montrer quoique ce soit de bien en moi. Est-ce qu’il reste quelqu’un d’avant cette guerre ? Je ne sais pas. Je n’ai pas la réponse, et c’est probablement ce qui me tue progressivement. Elle prend une gorgée de ma bière. Je passe derrière elle pour la finir, avant de me lever. Une bière, une bouteille de whisky et un verre. Non, pas de verre en fait, je n’en ai pas besoin. Je ramène le tout sur la table basse. Je décapsule la bière avant de la poser devant Alice, avec un sourire poli. Quant à moi, j’ouvre la bouteille et ne perds pas de temps pour en boire une, puis deux gorgées. L’avantage de boire souvent, c’est que je tiens de mieux en mieux l’alcool. Elle commence à manger. Meeko voudrait bien se joindre à elle pour le repas. Ce n’est pas mon cas. Je n’ai presque rien mangé de la journée, mais je n’ai pas faim. J’ai rarement faim à vrai dire. Pourtant, elle essaye de me tenter, en vain. « Je t’ai déjà dit de ne pas m’appeler comme ça. » Je n’aime pas les surnoms, encore moins celui qu’elle m’a donné. Tony. Je n’ai jamais donné de surnom à quiconque, et je ne supporte pas qu’on m’en donne. Pour certains, ça parait complètement stupide. Je suis stupide, voilà l’explication.
Elle me le demande. Je la regarde dans les yeux. Ses beaux yeux marrons, pleins de vie, pleins de malice, face à mes yeux bleus, sans expressions, vides de sens. « Je n’ai pas faim. » Ces sushis végétariens ne donnent aucune réaction à mon estomac. Il m'est arrivé d'en manger, les fois où elle les a emmenés, mais toutes les semaines, c'est trop pour moi et mon côté carnivore. J’ai du mal à comprendre qu’elle semble apprécier la compagnie de l’ours que je suis. Je n’ai pas de conversation, je ne fais pas de beaux sourire, je peux me braquer à n’importe quelle remarque. Qu’est-ce qu’elle veut ? Je prends à nouveaux une grande gorgée de whisky, puis pousse un soupir. Mon chien n’a d’yeux que pour le sushi que tient Alice dans sa main. « Donne lui, tu feras un heureux. » Le bien être de Meeko passe avant le miens. Peut être parce que j’ai espoir de pouvoir lui offrir une vie potable. Il mange son sushi avant de venir me rejoindre sur le canapé. Il continue d’observer Alice. Il pose sa tête sur mes genoux, comme il l’a fait cette nuit. Je reste affalé dans le canapé, pendant qu’elle mange. Le silence est d’or l’espace de quelques instants. Mais espérer de longues minutes de silence avec cette fille, c’est mission impossible. « Qu’est-ce que tu espères de moi ? » A la base, je pensais que cette question s’était posée dans ma tête. Mais quand j’ai croisé son regard surpris, j’ai compris que j’ai bien posé cette question à voix haute. C’est l’occasion d’avoir une réponse.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 17:32
Il revient avec une bouteille de whisky, et dépose une bière décapsulée sur la table. Alice n'aime pas ça. Pas la bière, mais cette attitude qu'a Antoine face à tout. Cette nonchalance, ce je-m'en-foutisme sans limite qu'elle avait du mal à comprendre. Non pas qu'elle ne le voulait pas, mais il avait tendance à se refermer sur lui-même, sans arrêt, et Alice ne pouvait s'empêcher de voir au-delà. Parce que c'est comme cela que son père l'avait élevée. Elle voyait toujours par delà les apparences, et malgré tous les efforts d'Antoine pour qu'elle le laisse tranquille, elle ne voyait pas juste cette facette qu'il montrait. Elle savait qu'il y avait autre chose. Il devait y avoir autre chose, quelque part, un autre Antoine qui était entrain de se noyer dans l'alcool et qu'on avait fini par oublier. Qu'il avait fini par oublier. Alice aimait les surnoms. Elle en avait beaucoup. Allie, Al, Lice. Pour elle, ils représentaient quelque chose. Ce n'était pas simplement pour faire joli, ou gagner du temps. Elle aimait les surnoms parce qu'ils traduisaient une amitié, une sympathie. Et malgré les réticences d'Antoine, elle lui donnerait toujours un surnom. Elle se fichait bien qu'il l'aime ou non. En fait, elle n'avait pas envie de lui faire plaisir. Elle avait envie de le remuer. De le sortir de sa torpeur. Elle avait envie qu'il s'exprime, qu'il parle. Qu'il lui parle. C'était peut-être pour ça qu'elle passait du temps avec lui. Elle voulait être la bouée de sauvetage. - Et tu sais bien que je n'écoute pas souvent ce qu'on me dit. Sourire espiègle, haussement d'épaule. Elle aimait piquer les gens, aller contre leur volonté. Parce qu'elle était comme ça Alice, elle vous vexait, elle vous donnait envie de la gifler, parce qu'elle n'allait jamais dans votre sens, elle ne faisait jamais rien comme vous le voulez. Et elle ne changerait jamais.
Elle plongea son regard dans l'océan de bleu de celui d'Antoine. Et au lieu de voir un simple vide, comme il l'aurait sans doute préféré, elle y voyait une tempête. De la colère, de la peine, une blessure. Un bateau à la dérive. Il n'avait pas faim. Il n'avait jamais faim. Elle haussa les épaules de nouveau. - Comme tu veux. Elle donna le sushi à Meeko, qui le dévora en une poignée de millisecondes. Lui au moins ne se faisait pas prier. Sans s'en rendre compte, Alice s'était mise à penser à l'alcool. A ces litres d'alcool qu'il avait dû avaler en l'espace de cette seule journée. A ce qu'il tentait d'oublier, et ce qu'il n'arriverait pas à oublier. Elle savait qu'il était soldat, avant. Et elle savait qu'elle ne pourrait jamais comprendre. Mais au moins, elle pouvait essayer. Un silence s'installa. Lourd, pesant. C'était rare. Les silences étaient réguliers entre ces deux-là. C'était simplement parce qu'ils n'avaient rien à dire. Et que chacun savait quand se taire. Mais cette fois-ci, Alice sentait autre chose. Et pour la première fois depuis des années, elle n'aima pas le silence. Elle releva la tête, surprise par la question qu'avait choisi Antoine pour briser ce silence épais. En fait, il n'avait pas semblé avoir parlé. Plutôt pensé à voix haute. Mais il l'avait prise de court. Parce qu'après toutes ces soirées passées ensemble, elle pensait qu'ils n'auraient pas besoin de passer par cette conversation. - Quoi ?, lâcha-t-elle dans un rire machinal. Elle le fixa. Elle ne comprenait pas. - Rien. Je n'attends rien. Je n'espère rien. Je… Je ne comprends pas. Elle ne savait même pas quoi répondre. Parce qu'en fait, elle ne savait pas. Espérait-elle le sortir de cette spirale infernale ? Espérait-elle qu'un jour, en entrant chez lui, elle découvrirait un appartement rangé et propre, et le jeune homme souriant qui avait sans nul doute déjà vécu? Elle ne savait pas. Et par réflexe, parce qu'Alice Demoulin détestait ne pas savoir, elle fixa la bouteille de whisky, serrée entre les doigts crispés d'Antoine.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 20:26
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Oh les femmes ! Elle est têtue celle-là, dès qu’elle décide quelque chose, impossible de lui faire changer d’avis. Il faut dire que j’étais un peu comme ça avant. Maintenant je m’en contre fou. Si les autres ne sont pas d’accord, je ne vais pas insister, je ferme ma gueule et je reste dans mon coin. Comme quoi, ça a ses avantages d’être seul. Je n’ai pas de comptes à rendre, je ne suis pas contraint de discuter. Je la regarde. Elle n’est pas à l’aise. Ma question l’a perturbée. Ce n’était pas le but, je ne voulais même pas lancer cette discussion en fait. Enfin il n’y aura pas de longues tirades, ce n’est pas mon genre, ce n’est plus mon genre. Elle essaye de retomber sur ses pattes, tel un chat agile. Mais je vois bien qu’elle n’ose pas me dire la vérité. En fait, j’en viens à me poser la question si elle sait vraiment pourquoi elle vient me « tenir compagnie » si souvent.
Je me redresse. Mon visage s’approche du sien. Mes yeux bleus se plongent dans ses yeux marron qu’elle essaye de détourner. Non, elle n’y arrivera pas. Elle ne peut pas ne pas me regarder. Meeko relève la tête. Le pauvre, je l’écraserai en me penchant vers Alice. Je ne lâche pas ses yeux. On pourrait entendre une mouche volée. « Tu ne réussiras pas à me changer. » Malgré ce que la situation prête à croire, ma voix n’était pas menaçante. C’était plus un ton désespéré. Personne ne peut m’aider à aller mieux. Je ne suis pas prêt, je n’ai pas envie. Rien ne sert de s’obstiner. La guerre n’a pas fait de moi quelqu’un de méchant. C’est plus un côté ours, à la fois brusque et associable. Je ne passe pas par quatre chemins. Je n’ai jamais fait ça. C’est une des qualités, ou défaut, qui m’est restée : l’honnêteté. Quoique. Suis-je vraiment honnête avec moi-même ? La réponse mérite réflexion. Je détourne le regard. Je me pose de nouveau, affalé dans le canapé. Meeko en profite pour se recoucher, comme il l’était avant que je le dérange, la tête sur mes genoux, le reste du corps étalé de tout son long sur le canapé.
Mon téléphone sonne. Je me lève. Je le récupère sur la table, et décroche. « Je vais bien. » Je raccroche. C’est ma mère, qui souhaite s’assurer que je suis encore en vie, et dans un état où j’ai encore conscience de mes faits et gestes. J’ai toujours ma bouteille de whisky à la main. Je bois. Une gorgée, puis deux, puis trois. C’est la seule chose qui me fasse du bien : me bourrer la gueule. Je m’arrête quand j’en ai marre. C’est le même cirque tous les soirs. C’est presque devenu normal pour moi, de boire. Je prends une clope et l’allume. Je sais qu’Alice n’aime pas ça, mais je m’en fiche royalement. Après tout, je suis chez moi. Je comme à fumer, près de la fenêtre. J’ouvre la porte-fenêtre et vais sur le petit balcon, où je peux à peine poser une chaise. Je m’accoude au rebord. L’air est frais et plutôt agréable. A peine quelques secondes que je suis là, et l’idée de sauter m’a déjà traversé l’esprit. Pourtant, je sais que je ne le ferais pas. Je n’ai pas le courage d’en finir avec la vie, aussi dévastatrice soit-elle.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 21:05
Il est près. Trop près. Son regard la déstabilise. Pourquoi ? Alice n'était jamais mal à l'aise. Mais là, alors qu'il s'était penché pour plonger son regard dans le sien, à nouveau, elle perdait ce contrôle qu'elle avait toujours eu. Et elle se sentait vulnérable. Pas menacée. Elle savait qu'il ne lui ferait pas de mal. Pas physiquement du moins. Elle était divisée, aussi. Parce qu'elle voulait fuir, fuir cette sensation nouvelle qui lui bouffait le ventre, et ce regard qui semblait s’immiscer dans son crâne. Mais elle ne voulait pas baisser les yeux. Elle ne pouvait pas, car malgré tout, elle continuerait à croire qu'elle peut répondre à des accusations infondées. - J'ai jamais voulu te changer. C'était vrai. Elle l'appréciait, tel qu'il était. Torturé, fatigué, seul. Elle l'appréciait. Et ce qu'elle voulait, ce n'était pas le changer. Elle voulait simplement apprendre à le connaître. C'était peut-être naïf, sans doute perdu d'avance. Mais Alice, elle ne baissait jamais les bras. Je ne pourrais même pas te changer, si je le voulais, pensa-t-elle, ça devrait venir de toi. Aurait-elle dû le dire à voix haute ? Sûrement. Mais elle avait cette boule dans la gorge qui filtrait ses paroles pourtant si fluides d'habitude. Elle ne savait ni où se mettre, ni quoi dire. En fait, elle aurait trop de choses à dire. Un flot de pensées rongeait sa boîte crânienne, mais elle était incapable de leur donner un sens.
Elle l'observe répondre au téléphone, machinalement. Par réflexe, il prononce une phrase toute faite, sans doute répétée des centaines de fois. « Je vais bien. » C'est facile, comme ça. On n'a pas à donner d'explications. Il boit à la bouteille, n'a même pas pris la peine de se sortir un verre. Alice voit bien qu'il n'a pas envie de parler. Mais elle sait qu'elle, elle a envie de parler. Et pourtant, elle le regarde simplement boire. Une, deux, trois gorgées. Il se lève, clope aux lèvres, et se dirige vers la porte fenêtre. Et elle reste assise derrière la table basse, incapable de décider de ce qu'elle devrait faire. Les secondes s'écoulent et le silence emplit la pièce. Et puis elle se lève à son tour, contourne le canapé et va s'appuyer contre l'encadrement de la porte fenêtre. Elle ne dit rien. Elle vient s'appuyer contre le bord du balcon, à quelques centimètres de lui. Elle pense, elle observe la rue en contrebas, bien consciente qu'il serait plus facile pour lui de sauter plutôt que de se battre. Mais la vie n'a jamais rien eu de facile, pour qui que ce soit. Elle tourne la tête vers le jeune homme. Elle voudrait qu'il parle. De lui-même. Ce serait tellement plus simple. Mais elle sait qu'il ne le fera pas. Elle regarde les lumières de la ville se refléter dans ses yeux. Et tant pis s'il n'aime pas le contact humain, elle attrape sa main comme pour lui dire qu'il n'est pas seul. Et elle la lâche, et fixe son regard sur l'horizon. Elle aurait envie de hurler, de le secouer, de jeter toutes ces bouteilles vides contre le mur mais elle se contenterait aussi bien de rester près de lui jusqu'à ce qu'il la jette dehors. Et même à ce moment-là, elle resterait.
- Combien de bouteille tu t'es descendu, aujourd'hui ? Elle a pensé à voix haute. Peut-être que ça le vexera. Peut-être que, cette fois, il ne se contentera pas de fuir. Peut-être qu'il lui demandera de partir. Mais elle avait parlé, et il n'était pas possible de revenir en arrière. Il commence à pleuvoir, alors elle se contente de tendre sa main où s'écrasent les gouttes froides. Et elle essaie de ne pas penser à l'odeur de cigarette qui semble s'incruster dans chaque pore de sa peau.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 21:31
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Elle pose sa main sur la mienne. Je n’ai pas le temps de réagir. Je n’ai pas le temps de retirer ma main qu’elle enlève la sienne. Elle sait pertinemment que ça ne me plait pas. Cette proximité avec elle, je n’en ai pas besoin. Je n’ai besoin de personne. En fait, je n’en sais rien. Est-ce que sa présence me fait du bien ? Est-ce que je suis prêt à lui parler ? Je n’ai pas de réponses. Pourtant, ce ne sont pas des questions très compliquées. Je ne peux juste pas reconnaître que j’ai besoin d’elle. Et la peur de son incompréhension est tellement forte qu’aucun son ne pourrait sortir de ma bouche quand bien même je voudrais lui parler de la guerre. Nous sommes là, face à l’immensité du monde. Les gouttes de pluie ne nous font pas bouger. Ce n’est pas la pluie qui va décider de nos faits et gestes. Non, c’est inconcevable pour moi, ça l’a toujours été. Je me souviens qu’enfant, j’étais le premier à sortir sous la pluie, avec mes bottes en caoutchouc pour sauter dans les flaques et me rouler dans la boue. Cette insouciance que j’avais, j’étais plein de vie. En y repensant, ça me manque. Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Mes rêves se sont envolés, mon sourire aussi. Et j’ai le sentiment que tous mes espoirs sont partis avec.
Le silence est roi ce soir. Pourtant, Alice ne peut s’empêcher de l’interrompre. Je ne peux m’empêcher d’avoir un petit rire quand elle me demande le nombre de bouteilles qui se sont vidées dans mon corps en l’espace de cette journée. L’alcool commence à faire effet. En même temps. « Pas beaucoup. » Elle ne s’attend pas à une réponse longue et argumentée de toute façon. Je ne compte même pas le nombre de bouteilles que je bois. Et puis, j’ai un minimum de sérieux, j’essaye de ne pas être totalement ivre au garage. J’ai à peine eu le temps de boire entre le temps où je suis arrivé chez moi, et l’heure à laquelle elle a débarqué avec ses sushis. Je la regarde. La pluie s’intensifie. Mais je tiens bon, bien que ma cigarette n’apprécie guère. J’alterne entre ma clope et ma bouteille. C’est aussi un moyen de la tester. Jusqu’où elle est prête à me protéger ? Il faut s’avouer les choses, squatter chez moi la moitié de la semaine, c’est une façon pour elle de s’assurer que je vais bien, et par la même occasion de ne pas avoir ma mort dans sa conscience. « Si l’alcool me tue, je te confie Meeko. » Je lui dis ça sans même lui adresser un regard, le sourire aux lèvres. Et je suis sérieux. Il l’aime bien, elle l’aime bien. C’est un moyen pour moi de m’assurer de lui offrir la vie que je lui ai promis. Je finis ma clope, que je jette dans le cendrier, sans y prêter attention. Je bois encore, encore et encore. Je vais finir tremper, je vais attraper une pneumonie, mais je m’en fou. J’ai envie de rester dehors, en t-shirt, et de boire jusqu’à ne plus tenir sur mes jambes. Quand ce moment aura sonné, enfin quelques secondes avant, je m’étalerai sur le canapé, pour tenter de dormir un peu en priant de toutes mes forces pour ne pas faire de cauchemar.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 22:30
La pluie s'intensifiait, et le cheveux bruns de la jeune femme commençaient à s'humidifier. Mais elle adorait la pluie. Elle avait toujours aimé regarder les gouttes apparaître et une à une s'écraser sur le sol, à une vitesse folle. Alors elle ne bougeait pas, et lui non plus. Ils restaient sur le balcon, comme deux idiots qui finiraient trempés et malades. Mais peu importe. Elle voyait bien que l'alcool avait déjà fait son effet sur Antoine, elle s'en doutait déjà. Et cette nonchalance qui le caractérisait s'intensifiait à mesure que l'alcool faisait son chemin dans ses veines. Elle leva les yeux au ciel, lorsqu'il prétendit n'avoir pas bu beaucoup. C'était idiot, de mentir. Il savait pertinemment qu'elle ne le croirait pas. Mais mentir était sûrement devenu plus facile qu'autre chose pour lui.
-Si l’alcool me tue, je te confie Meeko. Elle eut envie de le gifler. Il avait le sourire aux lèvres. Comme si c'était un jeu. Comme si c'était drôle. Savait-il qu'elle avait perdu son père ? Elle n'avait pas le souvenir de l'avoir mentionné. Mais s'il y avait bien une chose avec laquelle Alice ne plaisantait pas, c'était la mort. Elle avait peur. Peur de perdre à nouveau quelqu'un qu'elle aimait, quelqu'un à qui elle tenait. Et visiblement, Antoine ne semblait pas se rendre compte de l'impact de ses mots sur la jeune femme. Droit dans le cœur, elle dû serrer les poings pour retenir sa colère.
- C'est n'importe quoi. Elle avait parlé d'une voix tranchante. Elle avait perdu ce sourire qu'elle gardait depuis toujours. Comme si la peine d'Antoine s'était faufilée dans sa tête, et avait momentanément effacé tout ce pourquoi elle se battait chaque jour. Et au milieu de cette colère, elle avait envie qu'il dorme. Qu'il soit apaisé ne serait-ce que quelques heures, qu'il oublie, sans alcool. Elle se releva, se tourna vers lui et le fixa quelques secondes avant d'attraper la bouteille de whisky qu'il s'apprêtait à porter à ses lèvres pour la énième fois de la soirée. Sans l'effet de surprise, elle n'aurait sans doute pas eu la force de la lui arracher. Elle était frêle, pas très grande comparé à la carrure du jeune homme. Mais il ne s'attendait sans doute pas à une telle provocation, et elle commença à vider la bouteille par dessus le balcon. Les yeux droits dans les yeux, elle le fixa tandis que l'alcool se mêlait à la pluie.
- C'est n'importe quoi Antoine, répéta-t-elle. C'était un affront qui n'allait sans doute calmer aucun des deux. Mais elle ne supportait plus de le voir s'enfiler des bouteilles comme si rien d'autre ne pouvait l'aider. Ce n'était pas la solution, mais il était trop borné pour s'en rendre compte même en le lui disant gentiment. Alice n'aimait pas ce qu'elle était entrain de faire. Mais elle ne pouvait plus continuer à le regarder se détruire sans rien faire.
- Je te comprends pas. Je te comprendrais jamais, je le sais. Mais putain, fais quelque chose. Tu peux pas juste te laisser couler en espérant que tout ira bien lorsque tu toucheras le fond. Parce que ce ne sera pas le cas. Elle aurait voulu en dire plus, tellement plus, mais les mots se bousculaient dans sa tête, et elle avait cette sensation que chaque mot prononcé n'avait aucun sens. Et ça n'avait aucun sens, elle le savait bien. Et elle savait aussi que ça n'aurait aucun impact sur lui, parce qu'il avait les yeux fermés à tout ça, et qu'elle pouvait bien le frapper de ses mots autant qu'elle voulait, il ne suffirait pas d'une phrase pour qu'il voie les choses autrement.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 22:54
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Elle s’est braquée. Pourquoi ? Face à mon attitude certainement. Il n’y a pas de doutes, ce que j’ai dit ne lui a pas plu. Tant pis. Je ne vais pas commencer à faire du social. Je ne lui accorde même pas un regard. Pourtant, elle me prend ma bouteille des mains, et mes yeux ne peuvent s’empêcher de croiser les siens. Je m’apprêtais à boire. Mais elle en a décidé autrement. Elle vide ma bouteille, sur le balcon, sans gêne. Elle me défie. Et ça me met en rogne. Je ne lui ai rien demandé, de quoi se mêle-t-elle ? « Non mais tu te prends pour qui ? » Je quitte le balcon pour aller dans la cuisine. J’ouvre le placard où sont rangés tous les alcools. La vodka fera l’affaire. J’ouvre la bouteille, et commence à boire. Ce n’est sûrement pas Alice qui va dicter ma conduite, et me dire quand je dois arrêter de boire. J’allume une nouvelle clope, avant de m’asseoir dans le canapé, ma bouteille à la main. Celle-là, je ne compte pas la lâcher. Je suis tellement trempé que tout autour de moi va finir mouillé. Ce n’est pas bien grave, le canapé n’est pas en cuir.
« Je te comprends pas. Je te comprendrais jamais, je le sais. Mais putain, fais quelque chose. Tu peux pas juste te laisser couler en espérant que tout ira bien lorsque tu toucheras le fond. Parce que ce ne sera pas le cas. » Je ne la regarde pas, ni pendant, ni après ses paroles. En quoi ça la regarde ? En quoi elle a son mot à dire sur ce que je fais ? Je ne fou pas ma vie en l’air, elle est déjà foutue en l’air. Je n’ai plus rien. La seule bonne chose que j’ai faite depuis quelques mois, c’est d’adopter Meeko. Et pourtant, je ne suis même pas sûr à 100% que ce soit une bonne chose pour lui. Certes, moi j’ai de la compagnie. Mais lui, il partage l’appartement avec un mec saoul et sans joie du vivre, du matin au soir. Je ne lui accorde toujours pas un regard. Non pas qu’elle ne le mérite pas, mais en rien je n’ai besoin de recevoir de leçon. Je ne réponds pas. Je n’ai pas à me justifier, ni auprès d’elle, ni auprès de quiconque. Pourtant, ses paroles m’ont énervé. Et l’alcool n’aide pas. Je bois encore plusieurs gorgées de vodka, sûrement pour faire mieux passer ses mots. Elle m’a touché dans le peu d’égo qu’il me reste. Et pourtant, je pensais que rien ne pouvait m’atteindre, que j’avais déjà touché le fond. « Je n’ai pas l’espoir que tout aille bien un jour ou l’autre. » Je lui réponds avec colère. J’ai envie de tout envoyer valser. Je finis ma clope rapidement. Je bois. Je pose la bouteille sur la table. J’en prends une vide. Je me lève, et la jette de toutes mes forces sur le mur face à moi. Quel con. J’aurais dû lancer du bras gauche. Cette putain de douleur qui a gâché ma vie. L’origine de mon ivresse. Et le pire, c’est que je ne peux rien faire pour remédier à cette atroce douleur.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 29/10/2015, 23:43
Il avait raison. Pourquoi faisait-elle tout ça? Elle ne pouvait pas le dire. Elle était incapable de démêler tout ce qui se passait dans sa tête en ce moment même. Elle ne savait pas où elle voulait en venir. Elle ne savait pas ce qui l'avait poussée à passer autant de temps auprès de quelqu'un qui ne voulait pas être aidé. Pour qui se prenait-elle? Elle n'était ni sa mère, ni sa soeur, et il ne la considérait sûrement pas comme une amie. Et pourtant, elle s'acharnait, elle le poursuivait sans cesse, elle ne s'arrêtait jamais de chercher à comprendre. Et d'une certaine façon, il avait réussi à lui retourner le cerveau comme personne ne l'avait fait auparavant.
Nouvelle bouteille, nouvelle cigarette. Il l'avait laissée sur la balcon pour se réfugier dans ses gorgées de vodka. Elle frappa la rambarde du balcon du plat de la main. Antoine faisait ressortir un tout autre aspect de la personnalité d'Alice. Elle était loin, la jeune femme souriante et calme. Et elle le détestait pour ça. Elle resta devant la porte vitrée quelques secondes, juste le temps de le regarder se poser sur le canapé. Retour aux origines. Elle vint se planter devant lui, séparés seulement par la table basse, où les sushis étaient restés en plan.
- C'est tellement plus facile comme ça, hein? De te morfondre dans ton coin, alcool dans une main, cigarette dans l'autre, et d'attendre que le temps passe. Elle savait qu'il souffrait, elle savait qu'elle ne l'aidait pas en lui jetant sa colère à la figure. Et elle s'en voulait d'en rajouter à sa peine. Le blesser était la dernière chose qu'elle souhaitait. Mais la colère avait pris le dessus, et désormais, les mots coulaient sans qu'elle n'aie le temps d'y songer ne serait-ce qu'une seconde.
La bouteille vide vint s'écraser contre le mur près d'elle, et elle sursauta. Par réflexe, elle protégea son visage et ferma les yeux. Il n'avait jamais été violent en sa présence. Elle resta silencieuse un moment, immobile. Elle le fixait, tant de surprise que de soulagement de voir qu'il était encore capable d'extérioriser ses émotions. Il souffrait. Autant psychologiquement que physiquement. Son geste lui arracha une grimace de douleur. Son épaule. Alice avait, à force d'observer, compris qu'il avait été blessé. Mais elle n'en savait pas plus et n'avait jamais posé de questions. Parce qu'elle avait toujours voulu lui montrer une autre façon de vivre, plutôt que de le voir se braquer et se mettre en colère. Mais ce soir, c'était différent. Elle voulait qu'il hurle, elle voulait qu'il laisse s'échapper tout ce qui le bouffait depuis trop longtemps.
- T'as terminé, ou tu veux une autre bouteille vide, histoire de te défouler encore un peu? Elle le provoquait, volontairement. C'était mal, elle le savait. Mais il avait enfin une réaction normale, et il ne se contentait pas d'hausser les épaules et de répondre machinalement. Elle provoquait quelque chose, et elle ne pouvait s'empêcher de continuer à le pousser hors de sa zone de confort.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 30/10/2015, 00:04
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Elle veut me pousser à bout. Je ne veux pas lui montrer qu’elle est à deux doigts de la victoire. Je ne vais pas être faible, je ne vais pas lui dévoiler ma souffrance. Elle ne peut pas comprendre de toute façon, alors à quoi bon perdre du temps ? Je continue de boire. C’est la seule façon de me détendre un minimum. Je finis ma clope, trop tôt à mon goût. Je la laisse s’écraser dans le cendrier. Je ne bouge pas. Et cette putain de douleur qui persiste. Je cherche mon chien du regard. Il est couché, tranquillement. Il est habitué à ça. C’est fréquent que j’envoie tout valser, notamment après des cauchemars. Les cris, les bouteilles qui cassent, c’est presque devenu un quotidien. Je ne m’en sortirai pas. Et ça, elle ne veut pas l’admettre. Certes, elle ne connait pas mon histoire. Mais elle n’est pas dans ma tête. Même moi j’ai du mal à me comprendre. Alors pour les autres, c’est d’avance foutu. Ils m’ont pourtant conseillé d’aller voir un psy, à l’armée. Mais non. Je ne veux pas parler, ça ne m’aidera pas. Je ne veux en parler à personne, je ne supporte pas de voir de la pitié dans le regard des gens.
Elle veut se prendre une bouteille en pleine face ou quoi ? C’est la question que je me pose en vue de son comportement. Je me lève. Je ne lui accorde rien. Ni un regard, ni un sourire, ni de la colère. Elle m’a énervé, et je pense qu’elle en a conscience. Pour ce soir, je considère qu’elle n’est plus là. Je prends ma bouteille avec moi, à nouveau une clope. Là, ça commence à faire beaucoup pour mes poumons, mais j’en ai besoin. Enfin c’est ce que je crois. Au fond, je suis conscient que ça me bousille les poumons, mais concrètement, à ce moment précis, je m’en bats les couilles. Je ne sais même pas où aller. Je me décide pour aller dans la chambre, commençant à ne plus savoir où je mets les pieds. Des cadavres de bouteille trônent jusque là. D’un sifflement, j’invite Meeko à me rejoindre. Il ne traine pas. Je m’assois par terre, adossé à mon lit. Quant à lui, mon chien monte sur le lit, pour poser sa tête sur mon épaule. Notons qu’il fait les choses bien, il se pose sur mon épaule gauche. Je pose ma tête contre la sienne. Je continu de fumer, de boire, en tentant d’oublier. J’ai tellement de choses à effacer de ma mémoire. J’aimerais revenir au temps où j’étais en pleine forme. Je n’étais pas blessé, ni physiquement, ni moralement. Tout semblait aller pour le mieux. J’attrape un nouveau cadavre de bouteille. Je le jette contre le mur, à ma gauche. Forcément, je n’ai toujours pas réfléchi, et j’ai lancé avec le bras droit. Quel con. Jamais deux sans trois, il faut que je fasse attention avec la prochaine bouteille. Je prends une grande gorgée de vodka. J’ai déjà fini ma clope. Je vais essayer d’attendre au moins une dizaine de minutes avant d’en prendre une autre, mes poumons me remercieront plus tard.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 30/10/2015, 00:35
Il l'ignore. Tellement facile. Il agit comme si elle n'était pas là, à le provoquer. Comme s'il ne venait pas d'exploser une bouteille près de son visage. Il renie sa colère. Sans un mot, sans un regard, il attrape sa bouteille, une cigarette et quitte la pièce. Elle a le souffle coupé, parce qu'elle n'avait jamais ressenti une telle violence de l'esprit. Elle attend qu'il disparaisse derrière la porte de la chambre pour de laisser glisser contre le mur du salon. Elle était épuisée, à bout de force. Elle ferme les yeux, tentant de calmer les battements de son coeur. En touchant son bras, elle se rend compte qu'un bris de verre s'est enfoncé dans sa peau. Peu profondément, elle a juste à tirer un peu pour le dégager. Une petite goutte de sang apparaît, et elle se contente de l'essuyer d'un coup de main.
Elle entend une autre bouteille s'écraser contre le mur de la chambre. Elle ne sursaute pas. Ne réagit pas. Les larmes montent petit à petit. Elle s'en veut. Elle se déteste. Ne pleure pas. Ne pleure pas. Alice Demoulin ne pleure jamais. Et pourtant, elle a bien du mal à ravaler ses larmes. Elle essaie de pleurer en silence, parce qu'elle ne veut pas qu'il l'entende. Elle ne veut pas paraître faible. Elle n'est pas dans son état normal. Et elle déteste ça. Elle attend de s'être calmé un peu.
Elle se lève, hésite une minute. La porte d'entrée ou la porte de la chambre. Indécise, elle reste là à fixer dans le vide. À essayer de trancher. Si elle reste, elle n'a aucune idée de ce qu'il va se passer. Si elle part, elle baisse les armes. Elle l'abandonne. C'est hors de question. La facilité, c'est son choix à lui. Pas celui d'Alice. Elle traverse la pièce, faisant attention à ne pas marcher sur les bouteilles vides qui traînent sur le sol, et arrive devant la porte de la chambre.
Pendant une seconde, elle regarde Antoine, assit contre le lit, Meeko près de lui. Elle a l'impression de courir dans le vide, d'être projetée en arrière chaque fois qu'elle fait un pas en avant. Il ne bouge pas, même au moment où Meeko remarque la présence d'Alice et relève la tête. Elle hésite à nouveau. Il n'est pas trop tard pour partir. En fait si, il est trop tard. Il était trop tard le premier jour où elle a rencontré Antoine. Elle vient s'assoir à côté de lui, sans un mot parce que désormais, elle a peur que chaque phrase ne l'enfonce un peu plus, et se contente de lui prendre la bouteille des mains. Elle le sent résister, sans doute de peur qu'elle ne la vide aussi. Mais non. Elle la porte à ses lèvres, et en boit deux longues gorgées, avant de la rendre à Antoine. Et puis elle ramène ses genoux contre sa poitrine, et fixe le mur en face. Elle reste silencieuse pendant ce qui semble être une éternité. Trop de choses à dire, trop de réticence à les prononcer.
- Je voulais juste t'aider..., réussit-elle enfin à murmurer d'une voix qui trahissait cette vulnérabilité qu'elle avait jusque là réussi à contenir.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 30/10/2015, 11:24
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“Les hommes ne sont pas prisonniers du destin, mais les prisonniers de leurs propres esprits.”
Il n’y a plus un mot. Pas un son ne raisonne dans l’appartement. Et pourtant, la tension est palpable. Elle entre dans la pièce. Je sursaute. Le bruit de ses pas se posant sur le sol avec cette douce délicatesse ne me retient pas mon réflexe. C’est post-traumatique disent-ils. Dès que j’entends un bruit qui ne vient pas de moi, je sursaute. Rien qu’une porte qui claque peut me mettre hors de moi. Il y a un avant, et un après la guerre. Pourtant, je n’avais pas peur là-bas. Du moins, pas en permanence. J’étais un vrai guerrier, depuis tout petit. Les temps ont changé. Alice s’assoit à côté de moi. Pas un mot. « Je voulais juste t'aider... » Enfin, elle commence à comprendre qu’elle ne m’aide pas. Je regarde face à moi, dans le vide. « Personne ne peut m’aider. » Ma voix est à peine audible. Je tourne le regard vers elle. Mon regard est vide, perdu, je n’ai pas le courage de me battre. Je la sens triste. La colère est retombée. Pourtant, j’ai envie de partir, loin, très loin et ne jamais revenir. Je serais capable de le faire. Seulement, je ne dors plus, je ne mange plus. Je me contente de boire comme un ivrogne et de fumer. Tu n’iras pas loin pauvre con. Je me lève. Je vais dans la cuisine, tout en continuant de boire. Je n’arrêterais pas. Ni ce soir, ni demain, ni après-demain. Et ça, il faut qu’elle se le mette en tête. J’ai toujours été très têtu, tant que je n’aurais pas décidé, ce rythme de vie –si on peut dire- ne cessera pas. J’arrive à peine à mettre un pied devant l’autre. Je commence à voir flou. L’alcool et ses effets. Je ne contrôle plus rien. C’est d’ailleurs la raison qui me pousse à boire. Ne plus rien contrôler. Ne plus me rendre compte du désespoir qui ruine ma vie.
La pluie a cessé. Quand bien même ce ne serait pas le cas, ça ne changerait rien. Je vais sur le balcon. Je m’accoude à la rambarde, comme je l’ai fait tout à l’heure. C’était avant que je m’énerve, avant que je m’emporte. Je pourrais m’excuser pour la bouteille qu’elle a faillit se prendre en pleine tête. Mais elle m’a provoqué, elle m’a poussé à bout. Elle savait très bien que ça ne me plairait pas, elle a quand même prit le risque. Elle ne recommencera plus. Enfin c’est ce que j’imagine. Je ne suis pas dans sa tête, et je sais qu’elle peut être aussi butée que moi. Je me tourne, et me laisse glisser contre la barrière. Je ne maîtrise plus rien. Je suis capable de m’endormir, là, comme un con puisque mon lit est à dix mètres à peine. Si c’est le cas, je vais me réveiller dans une heure, en panique parce que j’aurais fait un énième cauchemars. Je suis seul. Je n’ai personne. Je ne veux personne. Je veux qu’on me laisse tranquille. Je veux qu’on me laisse finir de ruiner ma vie sans me donner de leçons de morale. Je veux en finir avec tout ça. Le problème, c’est que je suis incapable de mettre fin à mes jours, et je ne vais pas aller mieux. Au fond, je ne veux pas vraiment que tout s’arrange. Pourquoi ? Deux gorgées de vodka vont peut être m'aider à trouver une réponse.
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Sujet: Re: (antoine) let me in. 30/10/2015, 11:55
Alice, elle n'aime pas les gens qui fuient. Ceux qui pensent que l'ignorance est le meilleur des remèdes. Ceux qui restent muet lorsqu'on leur demande de parler, parce que c'est plus facile de tout garder. Mais ça n'avait rien de moins douloureux. Et Antoine, il fuyait. Tout le temps. Comme s'il avait peur qu'elle le découvre, comme si nier l'évidence allait l'apaiser. Et visiblement, ce n'était pas le cas. Mais il était borné, autant qu'Alice l'était. Et depuis le début de la soirée, ils enchaînaient affronts et fuites. Et elle ne savait pas qui allait gagner. Elle avait peur de qui allait gagner.
Il la regarda, d'un regard perdu, si bien qu'elle se demanda s'il la regardait vraiment. Elle le fixa elle aussi. Elle concentra toute la douceur dont elle était capable dans son regard. Elle n'était plus en colère, elle était seulement fatiguée de se battre pour quelqu'un qui ne voulait pas s'en sortir. Mais elle n'aurait jamais pu l'abandonner. Son père, elle n'a pas pu le sauver. Elle n'en avait pas les moyens. Mais lui, Antoine, elle était en mesure de l'aider. Il ne la laissait malheureusement pas faire, et elle n'avait pas encore trouvé le moyen de le faire parler.
Il se leva, de nouveau. Il fuyait, encore. Que fuyait-il? Elle? Lui-même? C'était perdu d'avance dans les deux cas. Il tituba jusqu'à la cuisine. Il avait beaucoup trop bu. - Antoine... Un murmure, plus pour elle-même que pour qu'il l'entende. Elle ne savait plus quoi faire. Elle ne savait plus si elle devait partir, ou si elle devait rester et le voir fuir encore et encore jusqu'à ce qu'il s'en épuise. Elle l'entendit dans la cuisine, puis sur le balcon. Elle se leva, caressa la tête de Meeko toujours couché sur le lit, et qui n'arrivait visiblement pas à suivre la situation. Sans un mot, avec patience, elle ramassa chacune des bouteilles vides qui traînaient par terre. Elle savait qu'il n'arriverait pas à atteindre son lit, ou son canapé, s'il trébuchait sur une bouteille. Et elle ne voulait pas qu'il se blesse. Elle les jeta toutes dans la poubelle de la cuisine, étrangement vide, et prit une grande inspiration avant d'avancer jusqu'au balcon. Il était assit, trempé même si la pluie avait cessé. Elle sent qu'il est à bout de force. Elle sent qu'il est temps qu'elle s'en aille. Elle gratta la peinture écaillée de la porte, et attendit une seconde avant de parler. - Rentre, change de vêtements, mets-toi au lit. Mais ne reste pas là. S'il te plaît. Tu vas attraper froid. Et ne bois plus. Pour ce soir du moins.
Elle n'attendit pas qu'il réponde, parce qu'elle savait qu'il ne répondrait rien. Elle pensait aussi qu'il ne l'écouterait pas. Et en refermant la porte d'entrée derrière elle, elle espérait simplement qu'il survivrait une nuit de plus.