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chat abyssin w/Lola

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MessageSujet: chat abyssin w/Lola chat abyssin w/Lola Empty18/11/2017, 20:03

LOLA & MARCEAU

J'AI SUR LE BOUT DE LA LANGUE
TON PRÉNOM PRESQUE EFFACÉ


Encore une adresse dénichée sur un site internet type  « slash paname » - censée faciliter la vie du touriste qui désire s’approprier la ville, de manière rapide et efficace, pour – plus tard- pouvoir s’en vanter. Comprenez bien qu’ils sont nombreux, ces pèlerins érudits dont le but ultime serait de se frayer un chemin parmi l’élite artistique de la belle capitale. Légion à vouloir se creuser un point de chute là où le beau côtoie l’hideux, le grand l’infiniment petit. Le brun souffle, une légère buée commence à se former, le temps s’est rafraîchi depuis la veille et, il maudit déjà les soit-disant météorologues qui, avec leur science de merde, n’ont pas su prévoir le gèle qui lui mord les joues. Il rit, car il est d’un naturel assez moqueur, du petit homme relou qui l’accompagne. Cette façon qu'il a de dénigrer tout ce qu'il voit, comme si la vie lui avait chapardé quelque chose, un truc de grande valeur qu'il n'arriverait pas à identifier, elle vient du fin fond, là où tout prend une teinte sombre.  Il s’agirait  d’une souffrance pérenne qu'il passerait son temps à montrer, par la critique. « Si j'ai bien compris, de tous les spots réputés «hype », tu viens nous traîner jusqu’au sixième là où tu dois donner un rein pour te payer une Heineken ? » souffle Marceau, peu impressionné, peu enthousiaste, peu enclin à "se boire un verre" avec ce gars insupportable ayant fait il ne sait quelle école et qu'on lui a collé dans les basques pour la raison tout juste évoquée.« Je croyais que tu voulais qu’on se synchronise ? » - l’œillade dont Marce le gratifie ,condescendante au plus haut point, lui coupe momentanément la chique. N'importe quoi.


(...)


A vingt et une heure deux, le scénariste se sent subitement ,et consécutivement à ce qui vient de se matérialiser sous ses iris bleus, archéologue. L’archéologue des sentiments amoureux, de ceux qui gisent sous plusieurs mètres de vérités réduites en cendres, il se déplace et observe minutieusement le moindre de ses gestes, pour en imprégner sa cervelle, des souvenirs simples qu’il invoquera lorsque la solitude du cœur se fera entendre : elle le fait toujours, pousser des vocalises lorsque le temps s’y prête le moins. Ou le plus, question de point de vue. Généralement, très  tard le soir, parfois lorsque le crépuscule s’installe et laisse place à la fatigue. Alanguie le corps se met alors à diriger ses attentes vers ceux qui ne sont plus là, elle n’est plus là, Lola, il s’en rend bien compte, Marceau, alors qu’il se passe une main fébrile dans les cheveux pour remettre en ordre autre chose que les idées qui germent et qui ne trouvent même plus de place pour prendre de l’ampleur, elles poussent de manière tordue, elles s’immiscent à travers les failles et lui scalpent salement la bobine. Il prend une profonde inspiration, niqué par cette présence qu’il n’attendait plus, il cherche une contenance, gesticule , le regard embrassant les têtes dont il se fiche éperdument mais , son regard ne réclame que sa tête – ses traits, ses mimiques qui mettent à feu et à sang son joli minois et rappellent à quel point la beauté chez elle est incontestable. C’est trop, pour le grand brun, un maelstrom qui  moleste, la frappe tactique réussit à atteindre le but. Premièrement, Marceau est mutique et tétanisé. Des réactions contradictoires face à un caractère qui en méprise l'essence. Deuxièmement, si l’envie de prendre ses jambes à son cou se fait doucement sentir : aucune issue de secours ne s’offre à sa vue. Lola, il l’a dans le sang et, ses pensées finiront par converger vers elle. Inlassablement. Jusqu’à ce qu’il y coupe court - s'il y coupe court, conditionnel. Avec les grammes d'alcool qu'il peine à évacuer, rien n'est moins sûr.

Des centaines de jours de relation ne s’oublient pas aussi facilement que cela, il tente de s’en persuader tandis que la terre s’arrête de tourner, dans son référentiel, c’est plus lui Terre, c’est la belle sylphide qui prend forme dans son champ de vision et qui le soumet à sa propre force gravitationnelle. D’individu ego-centré, il devient satellite dédié à celle qu’il a quitté, lâchement. Alors, peut-être qu’il vit là la singulière cruauté de ce que certains appellent Karma. Génial, la gifle, fortement appréciée, elle fait circuler le sang. « T’en penses quoi toi, d’ajouter un personnage handicapé, noir et homo, histoire de contenter toutes les minorités invisibles » - il aimerait rappeler à son collègue d’écriture que les minorités qu’il vient de citer , elles sont tellement visibles que certains scribouillards d'une commission perdue dans les couloirs sordides du Sénat ont jugé bon d'écrire des lois les concernant. Mais, Letellier, il se passe une autre conversation dans sa tête. Il se passe celle qu’il aurait dû avoir avec Lola. Celle qui aurait dû le dissuader de faire la pire connerie de toute sa vie. « Marce, t’es avec moi ? » - dieu qu’il aimerait être ailleurs, qu’avec lui, dans ce foutu repère à aristos intellos à la con . Ailleurs qu’avec seulement deux mètres et demi de distance le séparant du rappel de son erreur. Quelle déité a-t-il offensé pour se taper une poisse de cette trempe, sérieusement ? De tous les patelins de l’hexagone, de tous les quartiers de Paris et de tous ses coins branchés, pourquoi ce bar, en particulier, pourquoi celui-là, putain ? Lola est là et elle fait toute sa ponctuation, toutes ses phrases qu'elle transforme alors qu'elle ne l'a même pas encore repéré en des "putain-point virgule Lola". Complètement fichu, il plante boulet-Cyril, car ses bronches fort mécontentes d'avoir manqué d'air pendant approximativement dix secondes réclament maintenant qu'il les berce de souffre et nicotine. Sauf que. S'il veut la racoler sa cigarette, il doit passer par le point où l'ex se trouve, aucun mouvement tangente possible. Aucun qui ne le soit humainement. Deux mètres et demi, il pourrait au moins se montrer penaud de ne lui lancer à l'arrache qu'un  « Salut » pas ambitieux pour un sou sur son chemin. N'importe quoi, Letellier.
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MessageSujet: Re: chat abyssin w/Lola chat abyssin w/Lola Empty26/11/2017, 19:58

Le bar. L'éternel bar de quartier ... même chez les riches.
Le décor reste, les protagonistes changent et pourtant les soirées défilent et se ressemblent : Lola qui s'enivre en compagnie de l'Ivresse en attendant que l'Inspiration entre dans la danse. Lola qui rit, qui parle trop fort, offre des verres et s'en fait payer d'autres. Lola qui amuse la galerie, flirte ou console un énième esseulé au comptoir en prêtant une fausse oreille attentive. Lola qui joue son propre rôle en enfilant gaiement un costume qui lui ressemble sans être tout à fait elle, tous les putains de soirs. Et ça lui plaît, à l'effrontée, de s'oublier derrière l'euphorie chimique qui crame ses veines, de colmater les manques de son existence de rencontres éphémères. C'est facile et elle a toujours eu un goût certain pour les évidences.
Et les évidences sont apparemment pourvues d'un humour singulier, visant à se ficher glorieusement de sa tronche. Parce qu'elle est en train de se marrer avec une bande d'étudiants hipstero-hipsters en se prenant pour l'un d'entre eux et puis la seconde d'après, l'univers est suspendu au creux de son souffle coupé par l'ironie du sort. Elle n'a pas bonne mémoire, Lola. Elle est trop brouillon, trop inattentive pour ça, le genre à hocher la tête ou à répliquer un oui, oui inspiré quant en réalité elle n'écoute rien. Mais il y a une autre mémoire qui ne trompe pas, jamais. La sensorielle, celle qui s'éveille lorsqu'un grain de voix velouté, sensuel, s'adresse à elle et la ramène violemment en arrière. Elle l'a entendu chuchoter, susurrer, feuler, se marrer, râler, gueuler, connu enthousiaste, passionné, blasé, distant, mutin. Le timbre de Marceau, c'est une putain de symphonie pour laquelle elle a l'oreille absolue. Elle sait reconnaître les croches de la colère, les suaves du désir et ses arpèges. Celles qui commencent par la douceur prévenante et finissent en apothéose. Marceau, le chef d'orchestre aux jolis mots, il l'a ensorcelée assez longtemps pour qu'elle sache reconnaître par coeur la tessiture de son timbre, la sémantique de ses syllabes. Et bien sûr, ça électrise le plus infime atome qui la compose. Marceau putain de Lettelier.
Lola toujours à vif avec les émotions qui dansent sur sa peau, en a le souffle coupé et se raidit instinctivement. Elle n'a qu'à pas répondre, voilà. Elle n'a qu'à l'ignorer jusqu'à ce qu'il disparaisse. Après tout, elle est peut-être en train de le fantasmer à cause de l'alcool qui embrume son esprit, ce ne serait pas la première fois qu'elle imagine des retrouvailles qui n'existent même pas. Putain. Elle est trop spontanée, Lola, elle l'a toujours été. Elle est incapable de faire montre de volonté, et elle le sent, le chatouillement intempestif dans le coin de son oeil, comme une poussière, qui la force à venir le regarder. Le contempler, en réalité. Il est là, avec son naturel déconcertant et authentique, ses larges épaules auxquelles elle aimait se raccrocher et ce regard ... Un regard franc, à la fois limpide et insondable qui a toujours attisé les convoitises. Mais c'est même pas ça, le pire. C'est même pas de constater qu'il ressemble toujours à cette gravure de mode accessible, presque trop cool pour être réel, quand elle aurait rêvé qu'un centième de la douleur qui lui crucifiait le coeur s'affiche en lettres pourpres sur ses traits à lui. Non. Le plus dur, c'est la synesthésie qui frappe au mauvais moment pour mieux réaliser que même son putain d'halo (oui, Lola jure beaucoup et l'alcool n'arrange rien) ne s'est pas terni. Il y a toujours cette eau vive et dorée qui le nimbe et qu'elle aimerait recueillir entre ses doigts comme de la poussière de fée et reste accrochée à lui la même odeur enivrante, l'illusion olfactive rassurante et galvanisante qu'elle aimait respirer à plein poumons, contre sa nuque.
Putain. Putain. Putain. Le pire, c'est que Lola aimerait le détester. Elle aimerait vraiment le haïr, éructer dans un scandale tapageur et le faire fuir mais elle est incapable de le détester. Elle le sait, et sans doute le sait-il aussi. Il faut être deux, pour être ensemble, et même si elle a eu mal, elle n'a jamais su (ou pu) lui reprocher d'avoir été honnête au lieu de la bercer de mensonges illusoires. Lola, elle n'a plus qu'à ravaler le numéro de la fille bafouée nourri par l'alcool et essayer d'agir normalement, comme elle agirait avec n'importe qui. Et tant pis si pour cela, elle doit éluder son coeur qui bat la chamade et l'or liquide qui entoure le moindre de ses gestes à lui. "Salut." Si le timbre est plaisant, si un sourire lumière orne ses lèvres, il reste un rien mécanique, loin de sa fraîcheur jamais tarie. Et elle toise finalement Marceau, longuement. Elle essaye d'occulter tout ce qui fait mal mais également tout ce qui fait du bien, les souvenirs nostalgiques et les fous rires à trois heures du matin, les errances titubantes dans le Marais et les dessins ridicules que son pinceau aimait à croquer sur sa peau. Doucement, avec une précaution qui ne la connaît pourtant pas, elle et ses gestes turbulents, Lola dépose des phalanges colons sur sa peau, effleure délibérément son avant-bras comme pour s'assurer de sa présence palpable à ses cotés, à plus d'une année d'elle. Paris ne lui a jamais semblé aussi mystique. "Putain." qu'elle s'exclame face au destin facétieux en baissant les armes. Elle se marre librement, d'un rire facile, d'un rire d'ivresse comme épée et bouclier pour masquer l'embarras croissant et les plaies qui dégueulent à nouveau à son contact. "Tu parles d'une coïncidence." Lola, elle a l'âme artiste. Elle ne croit pas au hasard, elle croit au destin, à quelque chose de plus grand qu'elle et putain, ça fait tellement de sens d'être là en train de se regarder le nombril en chialant sur son inspiration perdue jusqu'à ce qu'elle se matérialise littéralement sous ses yeux.
Parce que tous ses tableaux, tous ses succès, portent son empreinte. Celle de Marceau. La lumière de leur relation sans ombrage, loin des drames et des trahisons et la profondeur du manque et de la perte. Du deuil de lui, et d'eux. "Qu'est-ce que tu fais ici ?" Dans le genre de quartier qu'il conchie, dans ce bar, il le prendra comme il le voudra, alors que Lola le dévore des yeux comme si elle souhaitait le graver contre sa rétine, se remémorer les détails qui s'échappent et deviennent immanquablement vaporeux, quand on s'interdit de les redessiner. Parce que Marceau, elle l'a évité à Paris, écoutant les conseils (non) avisés d'un meilleur ami érigé en expert de la rupture. Il y a des règles à respecter, se plaisait-il à expliquer à Lola, novice des ruptures elle si peu habituée à composer à deux sur le long terme. Arthur a longuement insisté, triant sur le volet leurs connaissances communes, les lieux habituels chargés d'histoire, emplis d'eux. Il en a dressé des listes jusqu'à obtenir un partage équitable. Pas des biens, abandonnés derrière depuis longtemps. Mais de leur histoire. C'est faire preuve de civisme, de déserter son bar préféré, de cesser de coloniser ses amis, d'accepter de s'amputer non seulement de lui mais de tout ce qui pouvait la ramener à lui. Et tout ça pour ça, retrouver Marceau de façon fortuite, dans un cadre loin de leur être inconnu : un putain de bar. "Tu ressembles à un anachronisme." A un passé qui se conjugue au présent.
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MessageSujet: Re: chat abyssin w/Lola chat abyssin w/Lola Empty30/11/2017, 11:33

LOLA & MARCEAU

J'AI SUR LE BOUT DE LA LANGUE
TON PRÉNOM PRESQUE EFFACÉ


Enchevêtrements de fil de soie, enveloppé d’cette colle biologique caractéristique qu’il reconnaitrait entre mille et le relargage corrosif de phéromones , macabres, ces composites combinés forment le parfait traquenard. 
Consterné, Marceau se raccroche aux moindres manifestations d’aménité, pendu crapuleusement à ces lèvres pleines qu’il a tortoré dès que l’occasion lui était offerte ; il n’est plus rien qu’une coquille soumise  au genre de magnétisme qui le débecte , qu’il jalouse, qu’il prête aux plus fourbes. Lola-tarentule s’empare de toutes ses fibres, toutes tournées dans cette direction qu’il a pourtant fui, il se traite successivement de con, de traitre, de mauviette puis il coince le sésame qu’il désirait fumer - et ce ardemment,  trente six secondes plus tôt – derrière son oreille. Il l’entend, cette voix , enrober de velours tous les mots qui vibrent contre les cordes vocales de la blonde et attaquent sans scrupule ses tympans. Il se met naturellement à en adorer toutes les intonations ; les lettres que sa langue caresse, celles qu’elle crache insensiblement, il retrouve progressivement les automatismes acquis à force de côtoyer le phénomène. La tête qui se penche sur le côté, les yeux qui détectent les rictus, le silence grave porteur des paroles tonitruantes qui ne traversent jamais les barrières , occultées par la raison qui joue toujours les rabats-joie : le géant n’entend pas seulement, il écoute et traite l’information, il boit et n’étanche même pas sa soif dans la foulée. Il essaye de décortiquer et de traduire ce qui peut bien se planquer derrière les apparences, le self control, peut-être des piques visant le cœur, visant la culpabilité, l’éveil d’une bête chimère des regrets et des non-dits. Bredouille, Marceau croise les bras sur son torse, il cache peut-être l’palpitant qui tambourine hurlant à l’aide contre côtes et sternum. Il cache peut-être les doigts qui tremblent et réclament , incontrôlables, le toucher de cette peau à la carnation rose-saumon, au grain satiné qu’il lui est arrivé des millions de fois de lécher, concupiscent. Peut-être simplement qu’il se soustrait à cette main, posée tantôt sur son avant-bras, dont il ressent toujours l’effet, contact d’une peau contre un fer-chaud, les cloques, elles se mettent à gonfler dans les coins résignés à la garde d’un fiel vicié. Il la connaît beaucoup trop, il la sait, il s’est longtemps considéré comme une extension Lola Leroy, la coïncidence évoquée, les questionnements posés viennent uniquement érafler les réalités qu’ils envisagent, chacun de leur côté. S’il voit là l’expression cartésienne d’une loi murphienne bâtarde , Lola quant à elle aperçoit le jeu d’un destin auquel il serait impossible de débiner et décaniller. C’est la merde internationale pense-t-il, alors qu’il se passe la paume sur le visage, il n’efface pas le sourire qui n’a pas quitté ses lèvres depuis qu’il s’est planté devant elle, ni même les contorsions énamourées des deux globes azurés composant son appareil visuel, bien sur que non. Depuis quand son corps  se comporte-t-il  de manière civilisée lorsque la peintre  défie le convenable ? Marceau ,alerte, refuse de  s’assujettir à ce destin farceur, à toutes ces coïncidences floues qui ne lui facilitent jamais la tâche. Il hausse les épaules et ce sont tous ses muscles qui  roulent sous son pull fin nervuré, de couleur blanche, éclaboussé par ses amours pas très nets ( pour le café, les stylos billes de qualité discutable et les condiments). Il n’est pas présentable. « Calembour personnel, le mot coïncidence,  sonne bizarre encloué dans ton phrasé » - souffle-t-il, de sa voix dont le rauque se retrouve accentué par les notes du désir inavouable qui revient narguer les choses qu’il se souvient avoir fait et  se voit faire, quel porc. « T’as la pupille qui brille, Lola. J’ai l’impression que tu divagues déjà, t’as apporté de quoi coucher sur canevas les idées que t’inspire le fait de me revoir ? J’imagine que sous tes pinceaux, je risque d’arborer des traits déformés par toute la laideur des non-aurevoirs» - il n’y en a pas vraiment eu. Il s’est contenté de plier bagage, furtif et froid, comme le membre d’une faction agissant dans l’ombre. Elle ne le montre pas mais, il doit lui inspirer quelques noms d’oiseaux lancés avec fort peu de politesse. De toute façon, il assume ses choix individualistes et couards, il n’a juste plus l’habitude de se retrouver sous le feu de ce regard là, scanographié et gravé dans la mémoire pour constituer quelque chose qu’il ne préfère même pas nommer. Letellier ne prend même pas la peine de saluer la brochette d’écoliers insipide qui la flanque de part et d’autre ; son attention est toute à elle, à ce sourire crispé qu’elle arbore. « Eh bien, cela résulte de la coordination d’une envie nécessaire de changer d’air et ...le boulot. Rien de très extravagant, rien de très intéressant » - mais, dire qu’il n’a pas envie de lui raconter, tout, par le menu détail ; sur ses ambitions, ce qu’il prévoit – serait faux. Il veut combler les vides enchâssés depuis ces douze derniers mois. Cela fait un an, cela fait un an ; il le répète comme le début d’un monologue, celui qu’il devrait lui tenir, à cet instant précis. Il y décrirait le manque et répondrait surement à tous ses « pourquoi », s'il en a et de ça, il ne doute pas. Toutefois, pile à ce moment là, il ne s’en sent pas capable alors, il fait la roue, oriente la conversation par le mouvement, il désigne sa clope et , dehors. « J’en peux plus, j’vais m’en griller une » - parade pour sortir de scène ou invit’ à développer tous les propos, ailleurs ? Il tâtonne sans le savoir, déjà , il esquisse les pas le menant vers l’extérieur.
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MessageSujet: Re: chat abyssin w/Lola chat abyssin w/Lola Empty19/12/2017, 22:09

Lola se sent capitaine.
Mais d'un navire en détresse.
Le genre de rafiot de fortune secoué par les flots, balayé par les vagues amères d'un passé tornade contre lequel elle ne peut pas lutter. Parce que c'est déjà écrit. C'est écrit qu'elle va se noyer dans les marées de sel de ses pupilles, qu'elle va oublier de combattre, accuser le choc comme une condamnée à mort déjà résignée. Lola, elle fait pas dans les regrets. Elle est de ces filles faciles qui se contentent de mordre la vie à pleines dents, d'être oui, toujours oui, audacieuses et sereines, conscientes de la chance qu'elles ont d'être seulement là. Et là, face à Lui, face à Marceau et aux réminiscences de tout ce qu'elle éprouvait à ses côtés, toutes les évidences oubliées, les mécanismes rouillés, elle sent la houle rouillée des regrets venir la submerger.
Et l'onde glacée qui la percute a le goût du sang mêlé à la tequila.
Elle se mord la langue Lola, témoin impuissante de son propre naufrage, prisonnière d'un corps qui vibre, vit, cogne et enjôle alors qu'elle a lâché les commandes. Elle croit qu'elle a l'alcool à remercier, la boisson qui l'anime et ralentit le poison des effluves de Marceau. Cette terrible odeur de nostalgie, ces saletés d'hormones qui dansent autour de lui et viennent chatouiller les siennes, aux aguets. Lola, elle sourit, elle croit qu'elle fait bonne figure, mais à l'intérieur, c'est l'anarchie. C'est Picasso mêlé à Van Gogh renversé sur Kandisky et ce qu'il reste de sa cervelle de moineau embrumée combat férocement son palpitant et le moindre atome qui la compose : parce que Lola, elle veut juste fondre dans ses bras et s'y laisser mourir. Un truc du genre. Ce n'est même pas une envie ça devient un besoin, à mesure que ses opales clairsemées d'ivresse, glissent le long de sa peau. Putain de Marceau. C'est pas juste. C'est pas juste d'avoir envie de lui après tout ça, c'est pas juste de vouloir sentir sa peau contre la sienne, de désirer sa bouche, sa nuque, d'être aussi mécaniquement, physiquement, chimiquement attirée par ce grand salaud à l'irrésistible sourire de gosse.
Mais Lolita, elle ne peut rien y faire : elle est toujours tombée pour les sourires, ceux qui désarment, ceux qui ont l'air d'avancer sans rien dissimuler, les paumes ouvertes et le coeur dedans. Et derrière les couches de snobisme et d'humour douteux, c'est ce qu'il est Marceau. Authentique à en crever avec son pull crado, ce corps dégingandé qui ne semble jamais tout à fait à sa place et son regard malin, canaille, le genre à te décocher toutes les flèches d'un coup sans avoir ne serait-ce que l'air d'y toucher. Et Lola, esthète devant l'éternel, ne résiste jamais au chant du corps. Elle décèle les petits riens qui se cachent dans les grands ensembles, fond pour les détails infimes qui émeuvent et s'éprend de la poussière qui sépare les gens beaux de ceux qu'on aime, les belles oeuvres de celles qui font chialer. Marceau hausse les épaules, lance un salut penaud et toutes ses fondations coulent et glissent au sol comme une soierie précieuse.
Pourquoi ne s'est-elle pas battue, au juste ?
Pourquoi a-t-elle joué à la fille cool jusqu'au boutisme, celle à qui ça va de se faire larguer en silence, celle qui pense valoir mieux que ça, les adieux poignards et les menaces sifflées d'une langue vipère. La vérité, c'est que tout, littéralement tout, aurait été préférable au point final qui fait mal, l'abrupt, celui qu'on n'attend pas. Mais Lola, elle n'a nourri sa rancoeur qu'à l'intérieur, cueillie au pinceau pour sublimer des toiles jusque là correctes mais sans âme. Elle n'a pas pleuré ailleurs qu'en peinture et le résultat n'est pas fameux : une fillette qui bat des cils devant son crush en espérant qu'il la remarque enfin. Putain, ce que t'es pathétique. Réveille-toi, Lola. Et c'est sa voix, qui l'éveille - un peu. Sa première phrase lui échappe, bercée qu'elle est par les frissons délicieux que lui arrache son timbre. C'est la suite, qu'elle entend. La pupille qui brille. Ca la fait sourire, comme si elle avait de quoi être fière, de traîner toujours autant les bars, de chercher l'ivresse qui console comme d'autres la dope. "Je crains que les idées que ça m'inspire ne soient pas très très catholiques ..." Elle avoue de but en blanc ce que ses yeux langoureux suggèrent déjà, Lola, mots sucrés rendus onctueux par la boisson. Ma foi, ça a le mérite d'être honnête tant son coeur coule jusqu'à son ventre à mesure que Marceau ondoie sous ses yeux désireux, qu'il parle, qu'il vit. Qu'il se contente d'être là, lui le grand absent de cette dernière année. Vaguement remplacé par des placebos mais jamais chassé de la place immense qu'il persiste à coloniser, même dans son absence. Mais elle rétro-pédale, Lola, dans un soupçon de dignité qui ne la touche que fort rarement. "Ça va, je déconne. Y a plus rien de toi sous mes pinceaux, j'ai saigné toute la peinture que j'avais à l'intérieur." C'est pour ça qu'il y a plus rien du tout, sous tes pinceaux. Mais ça, Lola, se garde bien de l'avouer dans une volonté non-assumée de lui faire un peu mal. Pas très mal, elle ne le supporterait pas, juste un coup de griffe sur le tableau de ses vanités.
Une main fébrile se perd dans sa crinière couleur soleil alors qu'elle cherche un nouvel équilibre. Cervelle qui patine, palpitant à l'agonie, elle peine à conduire cette valse dont elle ne sait rien. Lola, c'est la nana qui reste pote avec ses ex, transforme les amants en amis et le fait naturellement, sans rien forcer. On ne la déteste que très rarement, et elle rend volontiers la politesse. Mais Lola, c'est rare qu'elle aime. Qu'elle Aime comme on devrait aimer, l'autre avant la passion qui nous anime. Marceau, elle l'a adoré plus que la beauté des sentiments fougueux qu'il a su semer en elle. C'est inédit, comme situation et elle a beau essayer de se remémorer toutes les fois où elle a rêvé cette scène, rien ne colle. Rien. Elle persiste à agir comme une cruche de comédie romantique, les mêmes qu'ils mataient parfois après l'amour ou une engueulade, juste pour rire du bonheur brut, indicible, de ne pas être comme eux, tous ces idiots clichés. Et pourtant ... y a pas plus comédie romantique débilitante que ça, les amours déchus aux destins croisés. Marceau erre sa silhouette fantomatique dans son nouveau quartier et au creux de ses lèvres entrouvertes meurent mille et une questions. Celles qui auraient fusées s'ils avaient été encore une entité unique ou même deux amis. S'ils étaient davantage qu'à nouveau deux inconnus séparés par le précipice d'une année et les douves des sentiments. Les siens, lave et ceux de Marceau, lac gelé. Lola, elle aimerait qu'il parle, elle aimerait arracher les mots jusqu'à ses entrailles s'ils s'y terrent mais à la place, elle laisse l'alcool la guider.
La logorrhée des gens soûls l'assiège et au lieu de la ribambelle de pourquoi, elle recentre l'univers autour d'elle comme la petite conne qu'elle n'est pourtant pas. "On risque de pas mal se croiser alors ... Un vieux mécène érotomane m'a légué son triplex dans le quartier. Tu verrais sa cave, y a même cette bouteille super-pompeuse qu'on s'était offerts pour fêter l'ouverture de notre compte commun. Tu t'souviens ? Le vin était dégueulasse et on l'avait payé tellement cher qu'on n'osait pas s'avouer que c'était clairement du vinaigre." Et elle oscille, Lola, entre vacherie et souvenir qui lui arrache un sourire tendre. Elle voudrait être une connasse mais n'en a pas l'envergure. Elle aimerait agir comme si de rien n'était, mais n'a pas non plus cette grandeur d'âme.
Alors elle reste là, à se remémorer l'acidité du vin blanc grand prix de ton cul contre son palais et sa crainte de puer tellement la classe populaire qu'elle se montrait incapable d'apprécier les vrais plaisirs de la vie. Et puis, l'un d'eux avait pouffé de rire, elle ne se souvient plus lequel, et l'embarras disparut. Ne resta ce soir là que les baisers brûlant la langue. Mais Marceau se défile, loin de la suivre le long de memory lane. Il désigne sa clope et fuit.
Entre stupeur et rage sourde, Lola reste coi. L'alcool crame ses veines au rythme des pas qui s'éloignent de lui. Ses rétines sulfureuses se dardent sur le dos sculpté de Letellier, jusqu'à le voir disparaître à l'extérieur. "Ça va ? C'est qui ce bouffon ?" demande le type à sa droite, une main sur son épaule comme s'il comprenait quelque chose à ce qui lui échappe totalement, à elle. Lola se dégage, sans un mot, un verre comme seule arme. Elle le vide entre ses lèvres qui tremblent de s'être trop tues, et s'en débarrasse entre d'autres doigts, en rejoignant l'extérieur. Les sensations chassent définitivement la réflexion. Plus rien ne fonctionne correctement là-haut, c'est l'heure du pilotage automatique pour mieux plonger vers les abysses. "Ecoute, je t'ai jamais forcé à me dire quoi que ce soit, on est d'accord ? J'ai accepté ton silence comme seule réponse parce que ... parce qu'on valait mieux que deux couillons qui se déchirent en ruinant tout ce qui a été si parfait jusque là. Je t'ai jamais rien demandé et encore maintenant, je te demande rien. Mais moi, je suis pas comme toi. Je peux pas juste me taire et laisser courir alors ... alors." Le verre de trop oppresse ses entrailles contractées par les non-dits qui ont trop alourdi ses épaules. Lola, elle sent les vertiges de l'amour l'emporter loin du rivage, elle sait qu'où elle s'engage, il n'y a nulle issue de secours, aucun retour en arrière possible. Elle ne devrait pas, lui dire. Elle ne devrait pas mais Lola n'écoute plus, elle ressent. L'amour qui tambourine, le désir qui cogne, les secrets qui tranchent, les regrets qui heurtent. Et la colère qui pénètre jusqu'à l'os comme un brouillard. "J'voulais que tu saches que j'étais enceinte, quand t'as décidé que ça avait assez duré. Quand je l'ai appris, j'ai essayé de t'écrire des dizaines de fois par ... par correction même si je ne comptais rien te demander et puis finalement j'ai jamais réussi à trouver les mots." Lola qui écrit si mal, qui lance des mots comme des coups de pinceaux, brouillons, chantants, trop nombreux. Elle a essayé de le prévenir, des dizaines de fois, jusqu'à perdre toute l'essence de son message, ses Marce devenant des Marceau, puis des Cher Marceau, jusqu'à l'impardonnable M. Letellier.
Et puis après ... il n'y avait plus rien à dire dans ce corps prêt à combattre l'envahisseur, déterminé à assassiner la plus petite extension de son être qui pourrait s'enraciner en elle et lui faire mal à nouveau. "Voilà. Tu sais." lance-t-elle d'une voix éteinte, glacée par son propre vomi verbal. Ses yeux fuient les siens, fascinés par les cendres qui se consument le long du bâton de nicotine. Putain, ce qu'elle donnerait pas pour une clope, elle aussi. Lola ne se sent pas mieux, pas plus légère, délestée du poids des secrets. Au contraire, sa nuque est raide et ses bras ballants semblent de plomb alors que l'ivresse se fait la malle pour l'accabler d'une gueule de bois sacrément en avance.
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MessageSujet: Re: chat abyssin w/Lola chat abyssin w/Lola Empty20/12/2017, 18:38

LOLA & MARCEAU

J'AI SUR LE BOUT DE LA LANGUE
TON PRÉNOM PRESQUE EFFACÉ


« Et ? » s’entend-t-il lancer, la voix mécanique détonne , algide, n’a même pas le don de réduire le brasier ; deux éléments s’affrontent, à travers leurs regards qui se font détenteurs de milliers d’autres secrets. Les pauvres mégoteurs ,qui comme eux ont mis le nez dehors, peuvent ressentir les crépitements dans l’air : le désarroi palpable, et l’accalmie rompue aux respirations qui se font plus instables, de vulgaires signes annonciateurs. Ils précèdent la tornade des mots qui écartèlent dans les grandes largeurs, redécoupent des petits bonhommes dans la chair tuméfiée. Il y a des bonhommes-Marceau, qui domine de sa hauteur l’artiste venimeuse, à la moue enjôleuse. Il y a des bonhommes-Lola, qui distille son venin dans les veines du scénariste raté. Lola, elle ne parle pas, elle ne discute pas, elle entame les premiers pas d’un tango où désir et haine tantôt s’empoignent et se saignent, tantôt paradent et se roulent des pelles. Marceau est soufflé,  là où une flamme dansait encore quelques minutes plus tôt s’élève désormais une fumée dense;  elle illustre l’agonie de cette part infime d’ignorance. Il vient de perdre une partie de lui, comme ça, comme un rien,  lancée au détour d’une phrase vindicative, la révélation qui coupe le sifflet. Et ? Qu’attend-t-elle donc de lui ? Pauvre bougre dont la seule stratégie de conservation demeure encore la fuite, il détalerait sur le champ s’il le pouvait. Il pourrait refuser Lola Leroy toute entière parce que c’est ce que son silence a clamé lorsqu’il a bouclé ses valises. «  Tu joues à quoi ? T’espères grattouiller le scrupule ou la culpabilité ? Éveiller un sentiment particulier , peut-être? » - il reste impudent, tout dans sa façon de fumer sa foutue clope hurle je-m’en-foutiste de premier ordre, rien dans ce que suggèrent ses yeux n’affirme ce qu’il prétend par le verbe. Il aimerait en revenir à ce compte commun évoqué tantôt, au vin blanc dégueulasse bu avec insolence, dans de vieux mugs plutôt que dans des flûtes. Il aimerait retourner au temps où. Ce « temps où » - l’éventail des possibles s’ouvrait sous leurs regards poupards affamés de sensations extrêmes, où le rose flamboyant de l’amour avait fini par prendre ses marques. S’il plissait un peu plus les paupières, il la verrait surement la couleur mièvre qui évoque des montagnes russes d’émotions, celle des grands sentiments. Il se sent contradictoire, Marceau. Sur le fil, celui qu’un vent contraire pourrait envoyer en rendez-vous avec le macadam, cette optique ne lui paraît pas aussi séduisante que celle de rester dans le refus total du changement. Il veut vivre et croquer la vie comme il a croqué Lola pendant deux années, pleinement, un putain de record à saluer , mesdames et messieurs. Mais, tout ce qu’il arrive à faire, parce qu’un homme c’est plutôt con , délétère et insensible, c’est de lui cracher la bile au visage, avec simili-élégance. « Ça t’amène où, putain ? »  - des questions, encore - la barbe ! - lui qui voulait cultiver l’indolence, jouer les comédiens - elle les aime bien ces bestioles forgées d’artifices et  maniérismes. A cet instant, il sait qu’elle n’est pas seule, qu’elle est bien entourée, qu’elle trouvera un moyen de surmonter tout ce qu’il peut bien lui faire subir, en n’abandonnant pas le sourire-canaille qui ourle constamment ses lèvres. Le grand garçon qu’il est , où est l’homme franchement !, décide d’envoyer paître toutes les facettes d’un masque social qu’il a en horreur, en arguant la seule raison qui lui paraisse valable, peut-être pas si acceptable, c’est tout ce qu’il a en stock en tout cas. «Je pensais que tu me comprenais , toi, plus que quiconque. Et que tu savais qui j’étais, au fond ». Nouvelle question : pourquoi est-ce qu’il lui dit ça ? Il s’en va d’un rire, la tête qu’il projette vers l’arrière, il achète l’insouciance au marchand des mythos – son cirque ne paie pas de mine, il ne dupe personne : ni l’assistance, ni même la principale concernée, ça, c’est sûr. Alors, il tire une longue latte de sa cigarette, en priant intérieurement pour que ses traits tachetés n’affichent pas ce qu’il s’escrime à cacher : à quel point ce qu’elle vient de lui balancer aurait pu changer la donne, si seulement elle l’avait envoyé, son sms de merde. Cela fait un mal de chien, n’empêche. Ça l’exaspère, le secoue, le pourfend de dix milles directions différentes, sous dix milles différents angles : il en chie, clairement. Elle l’a privé de dix milles bonheurs, en moins de sept secondes. C’est terrible. Sept secondes pour se voir offrir un cadeau et se le faire arracher, dans un soupire.«  J’oublie, tu me dis ça parce que tu n’es pas comme moi » - c’est quoi, ce ça, au juste ? Une insulte suprême ? Celle censée  avoir l’incidence d’une attaque  nucléaire ? Il cherche son regard mais, elle pose ses billes partout, sauf sur lui et toutes les choses qu’il formule, à travers ses propres billes. C’est déroutant, maladroit, parce qu’il n’est pas comme elle : désinhibé et prolixe – en tout temps. Il n’exprime rien, si rien ne lui est demandé. Défaut de fabrication qu’elle, avec tout l’amour et le désir qu’elle a réussi à lui inspirer, n’a pas solutionné.  Il fouille dans sa poche, tire le paquet de sésames qu’il lui tend d’une main animée de trémulations. Au point où ils en sont ...  «Tout ce que je sais , c’est que tu m’as privé d’une chose. Je n’arrive pas à déterminer si c’est par frousse ou par orgueil. Je n’arrive même pas à imaginer à quel point tu dois me haïr pour prétexter ta prétendue « correction » à deux balles » - le bête ricane, d’un ton détaché.  « Tu n’as jamais réussi à trouver les mots, toi, Lola Leroy ? L’éloquente, la facile à vivre, l’arc-en-ciel ?» - son arc-en-ciel ( le surnom acidulé, qui a perdu de sa saveur, octroyé parce que ses fringues étaient constamment tachées de peinture et surtout, surtout parce qu’elle lui faisait boire la tasse de bonheur). Marceau, il a envie de sortir une connerie, il ferait la remarque qu’après la pluie suit le beau temps et qu’apparaît alors l’arc-en-ciel. Seulement, le mauvais temps se dilate comme l’absence de mots. Elle a raison, la liane, elle n’est pas comme lui, elle relevait le niveau,  elle égayait tout :  des coins perdus de leur appartement (avec ses post-it fluorescents nullos)  aux coins perdus de son cœur congénitalement foireux (en se contentant d’être là, pour lui et avec lui). //Ce que tu as accepté, c’est que je te laisse. Tu m’as toujours connu spleenétique. En m’accueillant dans ta vie, tu as étouffé tes  désirs d’émancipation et tu as tout projeté sur moi :  tes ambitions, tes attentes parfois impossibles à contenter. Notre relation n’a jamais été parfaite, Lola. Tu m’as idéalisé. Je ne t’apportais rien. Tu étais indépendante, pleine de ressources, vivante et je ne doute pas une seule seconde que tu le sois encore. T’avais pas  besoin de moi et un jour, un jour j’ai fini par le comprendre. Et je me suis demandé à quoi cela pouvait me mener, c’est tout. Je me suis rendu compte que … un soir je m’étais couché, le lendemain c’était la fin.// Ses propos sont décousus, torrentiels, ils se répètent et se mettent bientôt à tapisser ses réflexions. Il jette un regard vers l’intérieur puis, un autre vers la blonde. Il prend conscience qu’il n’a rien dit. Que sa dernière tirade, il l’a énoncé dans l’espace étriqué de son crâne. « Ce que tu viens de dire ne nous avance à rien ».
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