jordane guérin ft. iris hoarau

les yeux dans le vague, elle réfléchit iris. à la première raison qui l'avait mené à pousser la porte de ce pub. certainement pas l'envie pressante d'alcool, elle en avait été guérie un peu plus tôt. peut-être l'envie de voir du monde. d'y apprécier la population cosmopolite de son paris. l'idée d'y trouver un cocon où se réfugier. autant de suppositions qui pourraient s'avérer vraisemblables mais desquelles elle n'arrivait plus à en trouver la véritable. dans le fond, l'important n'était pas le commencement mais simplement le fait qu'elle y soit encore aujourd'hui. et mieux qu'hier. comme si cet endroit devenait un peu plus sa maison à mesure que les heures passaient. confortablement installée dans un coin de la salle dont elle serait capable d'énumérer le moindre fauteuil abimé et le moindre bout de mur écorché, elle observait les allers et venues des clients. elle se plaisait à leur inventer une vie, plus ou moins jolie. et elle lançait souvent des regards à son amie jordane qui assurait le service. quand elle la sentait libre pour lui accorder un peu de temps, elle se trainait jusqu'au comptoir. pour y parler de tout et de rien, pester un peu, refaire le monde beaucoup. mais toujours à leur manière. incendiaire. et le moment était venu de retrouver la brune de la blonde. son derrière, iris le pose avec habitude sur l'un des tabourets de son qg. et elle lance ce sourire à jordane. celui qui en dit long. que les minutes à venir seront des souvenirs gravés en plus. puis, il y a des voix étranges qui s'élèvent. un type louche qui propose des verres à des gamines tout juste majeures. de celles qui l'ont sûrement cherché, ça ne sert à rien de le nier. mais iris, elle peut pas rester à regarder le tableau qui se joue sous ses yeux. ça l'agace. ça la démange. faut qu'elle bouge, qu'elle intervienne. elle lance un regard à jordane et elle sait qu'elles se sont comprises. elles sont faites dans le même moule ces deux-là. toujours réfléchir après. déterminée, elle se lève. accompagnée de son éternel acolyte. elles ne connaissent que trop bien ce genre de situations. il leur est même arriver d'y perdre des plumes. mais jamais assez pour les dissuader de recommencer. la foire aux problèmes.

jordane guérin ft. iris hoarau

elle en a jamais marre jordane. elle en a pas marre de travailler. parfois, ça la saoule de devoir se lever. parfois, elle a envie de casser des verres juste pour que certains clients arrêtent de venir poser leurs fesses ici. parfois, elle en envoie chier. souvent même. jordane, elle gère pas cet endroit. c'est pas à elle le pub. mais c'est tout comme. c'est dans ces coins-là qu'elle a grandi. c'est surement là que papa a ramassé maman. c'est là qu'elle a pris sa première cuite. qu'elle a rencontré son premier mec aussi. c'est ici qu'elle a obtenu son premier job. le meilleur de tous les temps. le plus crevant aussi. rien n'est parfait. c'est ce qu'on dit. alors, elle s'accroche et elle se plaint pas jo. elle lance des regards à iris de temps en temps pour lui faire comprendre qu'elle ne l'oublie pas. elle termine son service dans longtemps jordane. ça l'empêche pas de taper la discut et retourner derrière le bar quand y en a besoin. y a le petit stagiaire en secours aussi. elle l'aurait presque oublié celui-ci. encore un qui va pas faire long feu. il est nul. il est trop mou. il y connait rien. jordane, elle lève les yeux à chaque fois qu'il fait une connerie. elle fronce les sourcils quand il croise son regard. et puis alors qu'iris elle se rapproche pour qu'elles puissent commencer leur conversation, y a un gars qui hausse la voix. ça l'interpelle. elle regarde de loin. le petit, il semble paniqué. genre j'y vais ou j'y fais pas ? jordane, elle soupire parce que c'est n'importe quoi. il a pas les couilles. mais elles, elles les ont. alors iris, elle se lève de son siège et elle se place à côtés des filles. elles ont rien à foutre là celles-ci. c'est pas un endroit correct. putain si seulement elle pouvait leur dire jordane. sauf qu'elle était pareille à leur âge alors, elle ose pas. elle dit rien. elle préfère s'en prendre au type chelou. au pervers qui va la garder entre ses deux jambes. dégage de mon bar ! clair, net et précis. elle est pas très grande jo et puis, le fait que ça soit une fille, ça la rend pas super crédible non plus. mais, elle a une voix rauque. un de ces trucs que tu te choques au fil de temps parce que tu fumes trop de merde.

jordane guérin ft. iris hoarau

elle est étrange iris. elle passe son temps à user les tables et tabourets du pub du coin alors qu'elle ne boit pas d'alcool. ses potes l'adorent pour ça parce qu'elle ramène toujours la voiture. elle sécurise tout le monde. c'est la pote que chaque parisien devrait avoir sous le coude. pour ces verres qui voguent au quatre coins de la pièce, y'a même pas de tentation. juste du dégoût. un peu comme celui qu'elle ressent à l'égard du type qui lorgne ces demoiselles trop jeunes pour lui tenir tête. la blonde, elle aime pas qu'on s'en prenne aux plus faibles. elle aime pas qu'on choisisse la facilité. et surtout, elle aime pas que ce genre de pré-ados trainent dans les parages. parce qu'elles sont pas armées contre les énergumènes qui y ont tissé leur toile. jordane, elle attend un peu avant de se bouger. elle le regarde le petit. le petit nouveau qui a pris place dans les rangs, ou dans les pattes de sa jo', depuis ce qui se trouve être déjà trop longtemps pour elle. il est censé l'aider mais il l'a retarde. alors iris, elle rit. même pas dans sa moustache. parce qu'elle voit bien la mine de trois pieds de long qu'affiche son amie. la blonde s'était fait la promesse de s'amuser un peu de ce gars prochainement. pour l'heure, la priorité était ailleurs. les deux filles se levèrent remettre de l'ordre aux alentours. puisque visiblement, elles en ont plus dans le pantalon que le seul mâle se trouvant derrière le comptoir. dégage de mon bar ! jordane elle s'embarrasse pas de fausses politesses. c'est pas elle. elle va droit au but parce que c'est le seul moyen d'en finir. iris, elle se plante juste devant lui. seule la table les séparait encore. ça la démange la blonde. mais elle se la raconte pas au point de croire qu'elle pourra mettre à terre un mec de sa corpulence. elle n'est qu'une femme après tout. il sourit sarcastiquement le type. ça plaide pas en sa faveur. ça ne fait que piquer un peu plus les deux filles. fais pas trop le malin. j'suis ceinture noire de judo et j'suis vraiment pas disposée à rigoler avec toi aujourd'hui. avec sa taille fine, elle fait peur à personne iris. mais elle est nerveuse et hargneuse, ça compense. en attendant, elle lui offre seulement un regard noir. un de ceux qui aurait pu le shooter à la seconde. donc si la patronne te demande de prendre la porte, tu fais pas d'histoires. les deux mineures n'en mènent pas large. iris parierait les yeux fermés que cet incident leur avait déjà coupé l'envie de jouer aux grandes. jo' et iris n'ont pas l'intention de déclencher la troisième guerre mondiale. c'est pas leur crédo. elles ne savent juste pas rester tranquilles et ne pas dire tout haut ce qu'elles pensent si fort.