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J'veux pas foutre la merde, mais j'ai entendu "Bataille de polochons" [Azaël]

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MessageSujet: J'veux pas foutre la merde, mais j'ai entendu "Bataille de polochons" [Azaël] J'veux pas foutre la merde, mais j'ai entendu "Bataille de polochons" [Azaël] Empty22/11/2016, 22:46

This machine has no brain ...
J'veux pas foutre la merde, mais j'ai entendu "Bataille de polochons"

Le shooting sur lequel elle avait travaillé avait duré plus longtemps que prévu parce que le photographe était arrivé en retard. Autant dire que ça lui avait cassé le cul dès le départ. Si elle avait été seule, Zeno s'en serait foutue comme de l'an quarante. Le problème ? C'est que y'avait son baby-sitter à la maison. Et il avait beau être gentil comme un cœur, ce mec, elle avait pas envie de le retenir plus que nécessaire. Il avait une vie lui aussi, et sans doute bien d'autres choses à faire que garder la petite-fille d'une de ses collègues de travail. Heureusement qu'il était là, Az. Quand les parents de Zeno pouvaient pas s'occuper de Maxime, c'était lui qui s'en chargeait. Il avait aucune raison particulière de le faire. Zeno l'avait jamais connu avant de mettre les pieds dans le collège-lycée où sa mère travaillait. Elle était tombée sur lui par hasard. Et bon, visiblement, ce dernier faisait foutrement bien les choses.

Elle l'aimait bien, Azaël. Il avait cette espèce de candeur un peu inexpliquée qui le rendait … attendrissant ? Ouais, attendrissant. Quand Zeno le voyait, elle voyait parfois un enfant. Un môme  sage et innocent, qu'avait pas encore découvert à quel point c'était la merde ici bas. Comme s'il avait conservé cet aspect humain que la plupart des quidams avaient oublié depuis longtemps. C'était un petit miracle qu'il existe, Azaël. À tous les coups il était pas fait de chair et de sang. C'était un envoyé des dieux, ou quelque chose comme ça. Avec un nom pareil, ça aurait qu'à moitié étonné la modèle qu'il soit un ange, en fait.

Zeno gravit quatre par quatre les marches qui la menèrent au premier étage de la résidence. Discrètement, elle fit jouer la clé dans la serrure et poussa la porte. La technicienne s'était installée il y avait maintenant quatre ans, peu après la naissance de la gamine. Une forte odeur d'encens et une chaleur confortable l'accueillirent. Elle aimait bien son appartement. Un trois pièces sans prétention, niché au deuxième étage d'une maison autogérée. Ses voisins de pallier ? Des hippies. Ses voisins dans la rue ? D'autres hippies. Et quelques communistes, juste en face. C'était un quartier de chevreuils, de wawash, de foutus bouffeurs de graines ! Elle se sentait chez elle ici, y'avait pas à dire.

La brune-décolorée retira automatiquement les échasses qui lui servaient d'escarpins. Le plancher grinçait, et elle avait pas envie de réveiller la gamine en marchant dessus comme un bourrin, ou en s'éclatant joyeusement la gueule comme elle savait si bien le faire. Pas douée pour un sou c'te gonzesse. Elle espérait que Max dorme déjà. Depuis qu'elle avait chopé la crève, elle arrivait pas à enchaîner plus de deux heures de sommeil, la gamine. Ça l'aidait pas à guérir, évidemment. Ç'aurait été trop simple sinon. Zeno la laissait pas mal pioncer avec elle du coup, pour la rassurer. Enfin pioncer, c'était un grand mot. La petite somnolait pendant que sa génitrice fixait le plafond, occupée à compter les moutons et à maudire Morphée qui voulait pas l'accueillir à bras ouverts comme il le faisait avec tout un chacun, ce raciste.
Elle quitta son manteau et le posa à l'arrache sur le meuble du couloir pour se diriger à pas feutrés vers le salon. C'était pas qu'elle était bordélique, voyons. Juste qu'elle aimait pas quand tout était trop rangé façon hôpital. Puis bon, au moins, elle s'y retrouvait dans son bordel, ce qui n'était clairement pas donné à tout le monde. Zeno noua les extensions qu'elle avait encore dans les cheveux en une queue de cheval. Elle avait été tellement pressée de rentrer chez elle qu'elle s'était même pas débarrassée de tout le matos dont elle s'était parée pour son shooting. Elle avait encore sa longue chevelure claire de princesse, celle qui lui donnait l'impression d'être Raiponce, en plus éclatée. Pas démaquillée. Pas habillée proprement non plus. Elle avait juste enfilé une robe-pull trop large et aux mailles tirant la gueule au-dessus de l'association de sous-vêtements, harnais et résilles dans laquelle elle avait posé.

« Hey ! J'pensais pas que tu serais encore debout vu l'heure. »

Elle sourit. Azaël s'était fait une petite place dans la pièce à vivre, ce qui n'était pas chose aisée entre les machines à coudre, les jouets de Maxime, les plantes vertes, les mannequins et les malles de tissus et accessoires.

Le salon respirait la chaleur humaine. Y foutre le pied, c'était rentrer dans un cocon : des vieux tapis persans rouges au sol, des meubles en bois ayant sacrément vécu, des tentures orientales sur les murs orangés, et puis des souvenirs de sa vie antérieure. Y'avait une âme, dans cette pièce. Un vieux reste de ce que Zeno avait été avant que les merdes ne s'accumulent.

« Ça s'est bien passé, qu'elle demanda en se laissant choir sur le canapé. »

Zeno attrapa la blague à tabac qui traînait sur la table basse et entama la création de sa dose de nicotine. Elle fumait pas à l'intérieur. Jamais. Du moins pas chez elle. Y'avait la terrasse pour ça.

« Tu peux dormir ici si tu veux. Je te laisse mon lit, j'prendrai le canap. Ça t'évitera d'avoir à te retaper toute la ville à une heure pareille. Y s'fait tard. »

Ses prunelles vertes se heurtèrent douloureusement à l'horloge accrochée au-dessus de la télé. Elle s'en servait jamais. De la télé, pas de l'horloge. Elle aimait pas ça, la télévision. Elle se contentait donc d'utiliser son écran pour diffuser les quelques films ou séries qu'elle s'accordait de temps en temps et qu'elle téléchargeait depuis son ordinateur. Piratait, plus exactement. Parce que c'était toujours une Pirare. Y'avait qu'à lever les yeux pour constater que son tricorne rouge complètement éclaté trônait encore sur la bibliothèque.
     
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