« Ah ! Au secours,  lâche-moi ! » L’alien s’agrippe fièrement au t-shirt d’Emile qui est étalé comme une crêpe sur le tapis du grand salon. « LAISSE-MOI SALE ALIEN ! » La concernée sourit fièrement et s’installe à califourchon sur lui, encadré par le canapé et la table basse. Petit alien sadique, elle s’appuie volontairement contre le ventre du pauvre Émile qui hurle à en perdre la voix. Si on en croit ce que dit Émile, Emmanuela est la pire des choses qui lui soit arrivées. Le jour de son quatrième anniversaire, il avait pris soin de faire une liste des parfaits cadeaux que son papa avait envoyé par message à sa mère alors que cette dernière était en voyage depuis quelques mois. Elle n’avait rien trouvé de mieux à faire que de se pointer avec un extraterrestre dans les bras. « Dis-moi tout de suite où est-ce que tu as mis mes maillots  de bain ! TU SAIS TRES BIEN QUE JE DOIS ALLER A LA PISCINE AVEC LEYLA ! RENDS-LES-MOI ! » Puis elle crie quelques mots dans sa langue venue d’ailleurs, tandis que le coupable tente de se faufiler. « Pousse toi d’abord de là, grosse vache. » - « JE SUIS PAS GROSSE ! » Ah oui ça c’est clair, elle est mince comme une feuille. Frustrée, elle se lève et laisse son grand frère se précipiter derrière le canapé. « Alors, ces maillots de bain ? » - « T’avais qu’à pas cacher la télécommande la dernièr… » CLING CLONG. La sonnerie retentit, mettant fin à cette démonstration d’amour fraternel. Les deux gosses, malgré qu’ils soient déjà en âge adulte (difficile à croire je sais), se regardent fixement dans les yeux pendant une bonne dizaine de secondes jusqu’à ce qu’on entende encore le bruit de la sonnerie. Le problème, c’est qu’ils sont seuls à l’étage et que la grande porte se situe en bas. Des gros fainéants ? Mais non. « Bah. Qu’est-ce que t’attends pour aller ouvrir ? C’est toi la plus petite. » Elle roule des yeux, absolument pas d’accord avec cet argument. CLING CLONG CLING CLING CLINGCLONGCLIGCLONG. Ils constatent bien vite que leur invité se montre très patient. « Et puis quoi encore ? C’est moi qui ai ouvert la dernière fois. » Émile fronce les sourcils et descend les escaliers, les épaules bien droites, fier de jouer le rôle du grand-frère, comme s’il n’avait pas été obligé. Sa sœur le suit de très près avec un grand sourire de victoire collé sur les lèvres.

« Bonjour, je suis Charles Leroy. Représentant de l’institut de psychologie de l’université Paris Descartes. » Émile écarquille les yeux alors qu’il sourit comme un con. Ça fait un beau visage d'abruti. Alien s’approche de la scène en fronçant les sourcils. C’est vrai que cet homme est un petit peu étrange, avec ses yeux qui partent dans tous les sens et son chapeau en forme de pyramide qui date sûrement de l’année 1832. « Vous êtes qui ? » Qu’elle lui déclare durement, beaucoup trop méfiante comme personne, et Dieu merci. Sans elle, le petit con d’Émile aurait sûrement fait entrer des témoins de Jéhovah dans la maison. « C’est le représentant de ma future école, idiote. » Changeant systématiquement d’expression faciale, elle saute dans les bras de son frère et ne le lâche que pour qu’ils puissent effectuer leur terrible danse de la joie.