Il était plutôt tard, je venais de m'arrêter devant une vitrine de magasin en plein centre ville. Je profitais de l'air frais de cette soirée pour me changer les idées. Surtout que j'avais toujours préféré profiter de la capitale la nuit, tout est plus beau. Ma petite balade me permettait également de fumer une cigarette tranquillement, et sans empester personne. Beaucoup de gens ne supportaient pas cette odeur, alors que je l'adorais. Enfin, peu importe. C'est alors qu'une voix venue de derrière me fit me retourner instantanément. La nuit, on a aussi tendance à flipper davantage au moindre bruit. « T'as une clope ? » me questionnait un jeune homme. J'aurais pu dire non, j'aurais peut-être même préféré. Mais avec celle qui se oscillait de ma main à ma bouche, je pense que j'avais peu de chances d'être crédible. Je sortais donc mon paquet pour en extraire l'une d'elles que je lui tendais simplement. Ce sera une de moins pour toi Flavie, peut-être que ta santé s'en portera mieux, ou peut-être pas en fait. Il avait allumé mon offrande, je l'avais regardé faire, puis il l'avait laissé se consumer, alors qu'il ne lâchait pas mon regard. Il venait de passer au moins cinq minutes à me regarder, ou à me fixer, appelez ça comme nous voudrez. Pour ma part, j'avais fait un peu pareil, en ajoutant à cela quelques moments de gêne pendant lesquels je m'étais contentée de regarder de droite à gauche, autour de moi en somme. Son regard me mettait vraiment mal à l'aise, sensation que je n'avais pas l'habitude de ressentir. J'avais comme l'impression qu'il avait le dessus sur moi, que quand il me regardait comme ça, il pouvait totalement lire en moi, tellement facilement. Et je m'y refusais catégoriquement. « Je devrais y aller, il est tard ». C'était effectivement tout ce que j'avais trouvé pour couper court. « Est-ce que je te reverrais ? » A sa question, je ne répondis rien, je me contentais de hausser les épaules, affichant un petit sourire malicieux. Je ne savais pas ce que la vie nous réservait, si on serait amené à se revoir, si on se retrouverait sur le même chemin un jour. Ça, c'est le destin qui allait le décider pour nous. Ce dont j'étais sûre par contre, c'était que son regard allait me hanter longtemps.

Puis, il était devenu mon petit-ami. D'ailleurs, j'avais toujours tendance à surveiller Mathieu un peu trop. Mais ce n'est pas de ma faute si je ne supporte pas qu'on l'approche. Je ne partage pas, un point c'est tout. Nous étions donc sorti, et je m'étais arrêtée pour acheter une boisson. Il m'avait attendue dehors, vu qu'il regardait quelque chose un peu plus loin. Quelle ne fut pas ma surprise quand en sortant, je remarquais qu'une de ces filles repoussantes à souhait, je les trouve souvent comme ça et alors, l'avait encore alpagué. Impossible de le laisser sans surveillance deux minutes, ça traîne partout ces bêtes-là. Je me postais alors devant la boutique, regardant avec insistance dans leur direction, et attendant qu'il remarque que je m'impatientais. Il jeta un bref coup d’œil derrière lui et comprit que je l'attendais, il s'excusa auprès de la jeune femme avant de me rejoindre. « C'était qui celle-là encore ? » demandais-je, non sans lancer un regard dédaigneux à la demoiselle en question. « Je la connais vite fait » Je hochais légèrement la tête. « Ok tu la connais, et elle te voulait quoi au juste ? » « Rien de particulier, on discutait c'est tout » « Ah oui, vous discutiez. Je pensais que vous aviez autre chose en tête » continuais-je, en arborant un sourire ironique et mielleux. « Je t'assure qu'on discutait, qu'est-ce que tu vas encore aller t'imaginer » « Trois fois rien. Alors peut-être que toi tu discutais, mais elle, je suis pas sûre que c'était son but premier » lui assurais-je, tout en lançant un dernier regard noir à cette fausse blonde qui l'avait cherché. J'avais pris sur moi, parce que j'aurais pu aller la voir. Mais à la place, j'allais bouder le reste de la journée. Ou du moins essayer. C'était souvent mon activité favorite quand quelque chose ne se passait pas comme je le voulais. […] « Tu boudes ? » Pas de réponse. « Ok tu boudes. Tu sais pourquoi au moins ? » Je pris un temps avant de répondre, parce que j'étais censé ne plus parler quand même, sauf que c'était plus fort que moi, il fallait que je m'exprime. « Rassure-toi, je sais pourquoi je boude. Tu n'as pas un vague souvenir d'une blondasse en mini-jupe qui n'a pas perdu de temps pour te sauter dessus dès que j'ai eu le dos tourné ? Ah oui pardon, vous discutiez. Mais si elle voulait parler, je pouvais le faire à ta place sans souci. La conversation aurait été toute aussi passionnante » Mathieu soupira, avant de me répondre. « T'es jalouse de quoi au juste ? » La vérité, c'est qu'il en avait vraiment marre de mes crises à répétition. « Non parce que tu crois que je suis jalouse de cette poupée barbie ? Ce n'est franchement pas le cas » « Voilà, de quoi tu te plains alors ? Je ne fais que discuter avec elle, comme tu viens si intelligemment de le dire » m'expliquait-il, en me prenant par la taille. Je lui jetais un bref regard, mais détournais la tête aussitôt. Il ne fallait pas que je croise son regard, ou j'allais encore craquer. Pourtant, je recommençais une fois, puis deux, puis trois, et c'était fini. Un léger sourire se dessinait sur mes lèvres, furtivement, mais pas assez. Mathieu l'avait remarqué, et là, il savait qu'il avait gagné.